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Réussir une fusion : ne nous trompons pas d’objectif

Quel dommage que les opérations d’acquisition ou de rapprochement dont les due diligences ont été les plus fouillées, les business plan les plus détaillés, les stratégies les plus unanimement validées, ne soient pas celles qui se distinguent comme des réussites sur le moyen-long terme…

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Après 15 ans passés à accompagner les entreprises dans leurs projets de rapprochement, dans le cadre de nos activités de conseil au sein de SterWen, nous avons souvent constaté à quel point le décalage était grand entre l’euphorie de la décision et la leçon d’humilité donnée par les résultats finaux de l’opération, après quelques années.

Ne resservons pas les chiffres que tout le monde connaît, qui mettent en exergue, selon les cas, selon les sources, selon surtout ce qu’on a envie qu’ils nous disent, les bénéfices incommensurables retirés des opérations d’acquisition ou de rapprochement en matière de création de valeur, ou le miroir aux alouettes qu’ils constituent au regard du nombre déconcertant de déconvenues rencontrées par ceux qui s’y sont frottés.

Ces chiffres sont muets. Ils mentent par omission. Ils ne nous disent pas pourquoi certaines opérations rencontrent le succès, d’autres des échecs cuisants. La seule chose remarquable est que les succès ne sont au final pas forcément les opérations sur lesquelles, de prime abord, on aurait misé, et réciproquement.

Quel dommage que les opérations d’acquisition ou de rapprochement dont les due diligences ont été les plus fouillées, les business plan les plus détaillés, les stratégies les plus unanimement validées, ne soient pas celles qui se distinguent comme des réussites sur le moyen-long terme…Ce serait tellement plus rassurant pour nos esprits structurés, entraînés aux théories les plus sophistiquées.

Pour autant, rassurons-nous, mal préparer, mal calibrer une opération ne constitue inversement – et heureusement - pas non plus un garantie de succès ! Quoi qu’il nous soit parfois arrivé de rencontrer des réussites très inattendues en la matière.

Doit-on conclure pour autant qu’il faille mettre au clou nos processus bien huilés de sélection, nos meilleures pratiques d’élaboration de business plans, nos méthodologies éprouvées d’audit et de due diligence ? Non, bien sûr, mais il faut garder à l’esprit que la mise en œuvre de ces techniques n’est qu’une condition nécessaire, en aucun cas suffisante. Une fois ces phases achevées, rien n’est fait, rien n’est joué, et que le plus dur reste à venir.

Le monde financier dans lequel nous nous complaisons nous rassure en nous autorisant à nous étonner que des plans de mise en œuvre ou des prévisions ne donnent pas au final les résultats escomptés : surestimation des synergies, hypothèses de conjoncture économique trop favorables, vitesse d’exécution trop optimiste, sous-estimation des coûts de restructuration, insuffisante prise en compte des facteurs humains et sociaux, mobilisation. La liste est longue. Pourtant, tout avait été bien calculé, bien pesé, n’étions nous pas tous d’accord autour de la table ?

Mais voilà, une opération de rapprochement ou de fusion ne se réalise pas autour de la table.

Sans tomber dans un angélisme peu approprié au sujet, il n’en reste pas moins que beaucoup d’opérations de ce type sont réalisées avec un objectif purement financier, alors que la condition sine qua non de réussite et donc l’objectif unique, doit être industriel. La performance financière qu’on en retire n’est qu’une conséquence de la réussite dans l’exécution de ce projet industriel, en aucun cas une fin en soi.

Afin de transformer l’essai, nous estimons qu’une opération de rapprochement doit se fonder sur une idée simple : la valeur se créée lors de l’exécution du projet, pas lors de sa définition.

Tout est là. Avec la meilleure préparation possible, une exécution ne serait-ce que légèrement sous estimée, enterre définitivement tous les rêves de TRI, de cash flows, et de création de valeur dont le grammage du papier et la qualité de présentation des slides des rapports de consultants nous avaient convaincus d’incarner une Vérité sans appel.

C’est bien l’exécution qui permettre de démontrer aux équipes, aux clients et aux investisseurs le bien-fondé d’une décision de la décision de rapprochement. C’est elle qui lui donnera corps, l’affinera et l’ajustera aux réalités de l’environnement afin d’en faire une réussite.

Les synergies entre les compétences, les activités, les produits, les marchés, peuvent exister de façon latente, mais c’est par la mise en œuvre du projet qu’elles se révèleront. Ce qui donne toute son importance à la mobilisation des équipes opérationnelles autour des bénéfices directs et des objectifs clairs, et leur appropriation d’une approche d’exécution simple et structurée.

Dans l’approche opérationnelle de la fusion, les mots d’ordre sont les suivants : faire simple, ne pas précipiter, expliquer sans laisser planer de doute, mobiliser et déléguer, ne jamais négliger les difficultés opérationnelles et les ressentis des équipes, et s’adapter à l’environnement, toujours et tout le temps.

Dans notre monde qui fait la part belle à tout ce qui brille, ne nous trompons pas sur les succès à célébrer. La sagesse voudrait qu’on fête les projets de rapprochement réussis, plutôt que les décisions qui les ont générées, même si les premiers arrivent plus tard et en nombre cruellement moins important que les seconds.

Marc Sabatier , Octobre 2011

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