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Prévisions Saxo Banque pour le troisième trimestre : La pandémie de COVID-19 précipite la démondialisation

Saxo Bank, le spécialiste du trading et de l’investissement en ligne, publie ce jour ses perspectives trimestrielles sur les marchés internationaux pour le troisième trimestre (T3) 2020. Y figurent des idées de trading pour les actions, les devises, les matières premières et les obligations...

Saxo Bank, le spécialiste du trading et de l’investissement en ligne, publie ce jour ses perspectives trimestrielles sur les marchés internationaux pour le troisième trimestre (T3) 2020. Y figurent des idées de trading pour les actions, les devises, les matières premières et les obligations, ainsi que plusieurs thèmes macroéconomiques qui auront une incidence sur les portefeuilles de nos clients.

« Au cours des trois dernières décennies, après la fin de la Guerre Froide, et notamment après l’adhésion historique de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2001, le monde est devenu plus connecté et intégré que jamais grâce à la technologie et à la mondialisation. Néanmoins, à l’image du Président américain Donald Trump, le monde est désormais régi par les intérêts personnels, la défiance et par des guerres d’intérêts dans les cercles politiques et au niveau des chaînes de production. La pandémie de COVID-19 a amplifié cette tendance en l’espace de quelques mois à peine » explique Steen Jakobsen, économiste en chef et directeur des investissements chez Saxo Bank.

« L’abandon des chaînes d’approvisionnement mondialisées et la tentation de l’autarcie se traduiront par un vaste mouvement de relocalisation et par la mise en place de programmes incitant à produire localement. Le premier domaine concerné sera la production de matériel médical, suite à la pénurie grave et embarrassante observée un peu partout dans le monde en pleine pandémie. Dans la mesure où les responsables politiques seront désormais obligés de rendre des comptes sur l’autosuffisance des industries stratégiques, il y a fort à parier que les secteurs de l’énergie, de l’approvisionnement alimentaire et des technologies seront déclarés essentiels. La hausse des coûts marginaux engendrée par la relocalisation des capacités de production sera moins importante que l’impératif politique d’autosuffisance. Pour faire court, tous les produits vont voir leurs prix augmenter, et ce, en termes réels, pas uniquement par le biais de l’inflation ».

« Le coût sera considérable pour les consommateurs, pour les gouvernements et pour l’emploi. Mais il pourrait y avoir une conséquence bien plus préjudiciable que les répercussions de la démondialisation : la triste réalité est que la pandémie de COVID-19 a sonné le glas du marché libre comme moteur de l’économie. La décision de sauver tout ce qui pouvait l’être est compréhensible, mais cela accroît le risque d’un ralentissement durable de la croissance des PIB réels dans un contexte de zombification de l’économie ».

« La crise du COVID-19 a provoqué des dégâts immédiats car le surendettement des économies les rend vulnérables à tout choc exogène. Avec la mise en place des taux d’intérêt nuls ou négatifs et des plans de sauvetage à tour de bras, ce n’est plus le cas. Il n’y a plus d’incendie de forêt pour fertiliser la terre et favoriser l’émergence de nouveaux acteurs pour relancer l’économie. Il en résulte donc une baisse constante de la productivité et une contraction de la croissance des PIB réels sur fond d’endettement excessif ».

« L’impact sur les marchés et l’emploi sera extrêmement préjudiciable lorsque les mesures de relance prendront fin. Avec les prêts directs et indirects, les plans de sauvetage et les subventions, les dépenses publiques vont dépasser 50% du PIB dans de nombreux pays. Les gouvernements donneront de la voix au sein des conseils d’administration et de nouvelles réglementations vont voir le jour pour sauver l’économie et des emplois avec l’argent du contribuable ».

« L’ironie de la situation est qu’alors même que la pandémie de COVID-19 a provoqué des dégâts humains et économiques considérables, la réponse que nous avons décidé d’apporter à cette crise pourrait provoquer encore plus de dégâts. Au mieux, nous sommes en train de mettre fin à l’économie de marché. Au pire, nous sommes en train de la remplacer par un capitalisme d’État. Ce modèle est voué à péricliter car il faut des marchés libres pour garantir la formation des prix, la répartition des marchandises, l’innovation, et même, la démocratie ».

« Ce mélange de relocalisation, de nationalisme et de capitalisme d’état va sévèrement saper la croissance, l’emploi, le tissu social et les marchés. Les politiques mises en œuvre pour atténuer l’impact de la crise du COVID-19 procèdent d’une logique simpliste et archaïque qui voudrait que l’État soit tout puissant. Mais il faudra une approche globale et non pas locale pour lutter contre la pandémie et contre les risques similaires qui se présenteront à l’avenir ».

Marchés actions : du sang et des larmes sur fond de nouvelle donne

Les politiques monétaires expansionnistes mises en place pour atténuer l’impact de la crise ont rapproché les autorités budgétaires et les institutions monétaires : les vastes plans de relance qu’elles ont élaborés de concert pour lutter contre la contraction de l’activité économique, la plus violente depuis les années 1930, ont alimenté une bulle spéculative d’une ampleur que nous n’avions plus vue depuis l’an 2000. Cela étant, au moment où j’écris ces lignes, le S&P 500 a vécu sa moins bonne session depuis mars et l’indice VIX ‘The Fear Index’ s’est envolé, preuve que l’impact du COVID-19 est loin d’avoir disparu.

Peter Garnry, directeur de la gestion actions, explique : « Les marchés restent fragiles à l’entame du troisième trimestre. L’indice VIX laisse entrevoir un été très volatil. Les résultats du deuxième trimestre permettront de mesurer les dégâts réels pour les entreprises et pourraient nous donner une idée de ce qui nous attend.

« Les valorisations se sont rétablies à des niveaux pour lesquels l’histoire nous montre que le ratio risque/rendement n’est pas intéressant. L’histoire nous montre également qu’avec les niveaux de valorisation actuels, les investisseurs en actions mondiales ont 33% de probabilité de percevoir des rendements réels négatifs au cours des dix prochaines années ».

« L’année 2019 a été marquée par un écart de performance historique en faveur des actions américaines par rapport aux actions européennes. Les actions européennes ont accumulé un déficit de performance relative d’environ 5 écarts types par rapport aux actions américaines depuis 2007. Cela est dû à la vigueur du dollar, aux valorisations plus élevées des actions américaines par rapport aux actions européennes, à la plus forte croissance des bénéfices des entreprises américaines, aux vastes programmes de rachat d’actions et à un glissement tectonique des capitalisations boursières vers les entreprises technologiques, un secteur dans lequel l’Europe est à la traîne. Exprimé en ratio VE/EBITDA (VE = valeur d’entreprise) en glissement annuel, les actions américaines affichent des valorisations supérieures de 65% aux actions européennes. Cet écart de valorisation considérable obligera les entreprises américaines à faire un sans-faute en termes de résultats financiers ».

« Les entreprises américaines sont généralement moins endettées que les entreprises européennes, ce qui est une bonne chose lorsque la conjoncture économique est incertaine. Toutefois, ce sont les valorisations qui conditionnent en grande partie les performances futures. Par conséquent, en raison de la surperformance historique des actions américaines et de leurs valorisations élevées, nous pensons que les investisseurs auraient tout intérêt à commencer à surpondérer les actions européennes, et ce, malgré les risques politiques qui existent au sein de l’Union européenne ».

« La relocalisation est un thème émergent important qui devrait se révéler porteur au cours des dix prochaines années, tant sur le plan économique qu’en bourse. Dès lors, il serait judicieux d’investir dans des petites capitalisations réalisant leurs chiffres d’affaires localement et opérant dans des secteurs non cycliques de l’économie (santé, biens de consommation courante et services aux collectivités). La transition vers une économie mondiale plus ‘locale’ va créer une trajectoire incertaine pour de nombreuses entreprises. Dès lors, la bonne vieille stratégie consistant à investir dans des entreprises bien notées et faiblement endettées reste une option intéressante ».

« Nous pensons que certains secteurs de l’économie, comme la transition écologique, continueront à prospérer car le modèle économique actuel est un fardeau sur le plan écologique. D’autres secteurs comme la santé, la robotique et l’impression 3D profiteront également des politiques d’autosuffisance et de production locale mises en place dans le monde développé. En toute logique, les entreprises affichant une forte présence en ligne et un modèle économique faisant la part belle au numérique sont également promises à un bel avenir. Toutefois, dans la mesure où certaines entreprises en ligne affichent des valorisations extrêmes, les investisseurs ont tout intérêt à faire attention aux « valeurs spéculatives ».

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Source : Saxo Bank et Bloomberg

Le dollar reste le centre de gravité

Le 23 mars a marqué le point haut du dollar et le point bas de la plupart des grands indices actions mondiales. Depuis, les injections massives de liquidité, les rachats d’actifs et les programmes de financement de la Fed ont permis d’éteindre l’incendie et le dollar s’est rétabli dans sa fourchette de fluctuation tendancielle dans les semaines qui ont précédé la crise. Malgré ces interventions, nous pensons qu’il n’y aura pas de normalisation des marchés à court terme car les réponses des Banques centrales à la pandémie et la réorientation des politiques publiques partout dans le monde poussent les marchés vers la démondialisation.

John Hardy, directeur de la stratégie de change, explique : « Malgré le point bas touché en mars et le rebond impressionnant qui s’en est ensuivi, nous pensons qu’il est très peu probable d’assister à un retour à la normale sur les marchés ».

« Nous avons achevé un cycle. La forte hausse des cours des actions (et des autres actifs risqués) et la volatilité du dollar sont le résultat d’une abondance de liquidité qui a atteint son paroxysme. Par conséquent, l’ampleur des mesures de soutien à l’économie et aux marchés ne fera que croître dès lors que nous serons confrontés à une nouvelle crise profonde. Au fil du troisième trimestre, de nouveaux thèmes vont émerger sur les marchés internationaux et monétaires, en plus du thème habituel que représente l’alternance de périodes d’appétit pour le risque et d’aversion au risque qui ont marqué la majeure partie du deuxième trimestre en réponse aux injections de liquidité des Banques centrales ».

« Tabler sur un repli du dollar au troisième trimestre est peut-être un peu trop audacieux, mais le billet devra tôt ou tard se déprécier. Nous vivons dans un monde qui croule sous de la dette libellée en dollar, tant aux États-Unis qu’à l’étranger. Par conséquent, il faudra obligatoirement une dévaluation du dollar en termes réels aux États-Unis, et en termes relatifs et réels dans le reste du monde, pour pouvoir assister à une reprise durable de l’économie. Le risque d’une augmentation du nombre de faillites et de défauts encouragera les autorités compétentes à dévaluer le dollar dans une proportion que nous n’avons plus connue depuis la dévaluation de la dette survenue au lendemain de la Seconde Guerre mondiale ».

« La grande inconnue concerne la date à laquelle cette dévaluation interviendra, mais les injonctions à agir en ce sens vont se faire plus pressantes au troisième trimestre. Tôt ou tard, la Fed finira par perdre son indépendance, ce qui permettra au gouvernement de plafonner les taux ou de contrôler la courbe des taux, et, à terme, de dévaluer le dollar. Il pourra ainsi dépenser sans compter, sans avoir à se soucier de savoir si le marché peut absorber les émissions de dette souveraine réalisées pour financer les dépenses publiques ».

« Sur le plan monétaire, les grands perdants seront les devises des pays les plus durement frappés par la répression financière et ceux mettant en œuvre des politiques ultra agressives empruntant à la théorie monétaire moderne (TMM). Les grands gagnants seront les pays recelant un potentiel important en termes de matières premières Une attention toute particulière sera désormais portée aux comptes courants du fait de la démondialisation, du ralentissement du commerce et de la contraction des flux de capitaux ».

« Le troisième trimestre permettra également de voir si l’Union européenne (UE) est capable de faire preuve d’une solidarité suffisante pour éviter une nouvelle crise existentielle. Mais la réponse budgétaire de l’UE semble timorée et tardive par rapport à l’ampleur de la crise. Il lui faudra donc intensifier ses efforts au troisième trimestre. Il faudra un resserrement des écarts de taux et une plus grande solidarité pour que nous puissions exclure le scénario d’une nouvelle crise existentielle de l’UE ».

Or : les investisseurs haussiers pourraient être récompensés tardivement au T3

Contrairement à ce que pensent certains observateurs, il est peu probable que la situation revienne à la normale au cours des prochains trimestres. Chez Saxo, nous pensons que cette période sera marquée par des taux de croissance faibles, voire négatifs, par une hausse des niveaux d’endettement et par une accélération de l’inflation. Les perspectives pour les métaux précieux restent positives à l’entame du troisième trimestre. Toutefois, la pandémie, qui est loin d’être finie, et la perspective d’une seconde vague pourraient compromettre le récent rallye haussier des valeurs de l’énergie et de l’industrie, et toute nouvelle hausse au T3 sera fragile.

Ole Hansen, responsable de la gestion matières premières chez Saxo, explique : « L’or est la seule matière première majeure à avoir vu ses cours progresser depuis le début de l’année. Après un mois d’avril marqué par une forte volatilité, le prix de l’once d’or s’est stabilisé à l’intérieur d’une fourchette oscillant autour de $1700. La propension de l’or à frustrer les investisseurs patients dans un premier temps, puis à les récompenser par la suite, devrait donner sa pleine mesure au troisième trimestre. De nombreux facteurs porteurs sont actuellement annihilés par ce que nous pensons être un ralentissement temporaire de l’inflation.

« Nous réitérons nos prévisions haussières pour l’argent et pour l’or, car la prime du métal précieux par rapport à l’argent a diminué. Il y a plusieurs raisons de croire que le prix de l’once d’or atteindra au moins $1800 en 2020 et qu’il atteindra un nouveau point haut dans les années à venir ».

« L’absence de tendance de marché depuis avril et la conjoncture désinflationniste ont engendré une baisse de 55% des contrats à terme haussiers sur l’or depuis le pic du début d’année. Il y a fort à parier qu’une évolution favorable des facteurs fondamentaux ou techniques aurait raison de la frilosité des traders et les pousserait à revenir sur le marché. Cela pourrait également pousser le cours de l’or à la hausse ».

« La faiblesse historique du cours de l’argent par rapport à l’or explique le fort rebond observé à la fin du deuxième trimestre. Une augmentation du prix de l’or pousserait à la hausse le prix de l’argent. Mais compte-tenu de sa volatilité et des perspectives de croissance actuelles, nous pensons que l’argent pourrait avoir du mal à rattraper son retard sur l’or. Le ratio argent/or, qui permet d’évaluer la valeur relative, pourrait, dans le meilleur des cas, atteindre 95 onces d’argent pour une once d’or. Toutefois, en cas de deuxième vague pandémique, le ratio argent/or pourrait chuter de nouveau à 110, ce qui correspondrait à une baisse de 10% par rapport au niveau actuel ».

« Le cours du cuivre (HG) s’est rétabli à son niveau d’avant pandémie, ce qui devrait compromettre la capacité du métal à évoluer à la hausse au T3. Le redressement de la demande chinoise et les interruptions de production dans plusieurs mines d’Amérique du Sud ont finalement obligé les spéculateurs à se repositionner à l’achat après que le prix de la livre a franchi à la hausse les $2,50. Le risque d’une deuxième vague pandémique, en particulier en Chine et aux États-Unis, les deux plus gros consommateurs au monde, pourrait modifier la donne et nous n’anticipons pas de hausse de cours au T3 ».

« L’incapacité à contrôler, pour l’instant, la pandémie de COVID-19 compromet les perspectives pour le pétrole brut. Les pays de l’OPEP ont consenti des efforts considérables pour soutenir le marché mondial : ils ont accepté des réductions historiques de production et s’y sont rigoureusement tenus. Pour autant, il est peu probable que le cours du brut poursuive son rebond au deuxième trimestre ».

« Les restrictions de voyage à l’étranger, par voie terrestre et aérienne, sont toujours en vigueur un peu partout dans le monde. Or, dans la mesure où des millions de travailleurs ne sont pas près de retrouver leur emploi, le rebond de la demande de pétrole pourrait être plus lent que prévu. Alors même que nous sommes encore tôt dans l’année, certains observateurs se demandent si la demande n’a pas atteint un pic en 2019 et si la demande de pétrole n’est pas désormais vouée à diminuer dans la mesure où les gens et les pays modifient leurs modes d’interaction ».

« Une deuxième vague ne provoquerait pas de choc sur la demande similaire à celui observé en avril. La plupart des pays choisiraient plutôt de maintenir leur économie la plus ouverte possible, dans la mesure où les conséquences économiques seraient encore plus désastreuses. L’effondrement des cours du pétrole survenu en avril confirme la capacité du pétrole à « dépasser » les attentes. Nous tablons sur un rebond du prix du baril de Brent dans une fourchette comprise entre $50 et $60 fin 2020, début 2021. Mais pour l’instant, les perspectives à court terme laissent entrevoir une consolidation dans une fourchette comprise entre $35 et $45 durant la majeure partie du troisième trimestre ».

L’Europe rêve d’une relocalisation verte

La pandémie de coronavirus a mis en lumière la dépendance excessive de l’Europe à l’Asie, en particulier à la Chine et à l’Inde, pour la production de matériel et d’appareils médicaux et de principes actifs qui sont des composants essentiels de médicaments communément utilisés. Pour retrouver son autonomie, l’Europe doit adopter une stratégie coordonnée pour réaliser des économies d’échelle et réduire autant que possible les coûts inhérents aux relocalisations.

Christopher Dembik, directeur de l’analyse macroéconomique, explique : « La crise a fait prendre conscience aux gouvernements européens et à la société civile qu’il est urgent de diminuer la dépendance économique et sanitaire du vieux continent au reste du monde. Le rapatriement des chaînes de valeur n’est pas une idée nouvelle. En fait, c’est une idée aussi vieille que la mondialisation elle-même. Elle a connu un regain d’intérêt ces dernières années dans un contexte marqué par une poussée du protectionnisme et a gagné du terrain ces derniers mois à cause de l’épidémie ».

« En théorie, la relocalisation est une idée très attractive. Pour autant, la question est de savoir si l’Europe a les moyens de ses ambitions et peut devenir auto-suffisante. Le solde de la balance commerciale de la zone euro nous fournit une première réponse. Le commerce de la zone euro se caractérise par un excédent considérable, principalement dû à l’Allemagne (première économie du continent), qui a atteint 338 milliards de dollars sur les douze mois se terminant en mars 2020. Cela représente environ 2,8% du PIB de la zone euro. C’est le deuxième plus gros excédent commercial au monde, après celui de la Chine ».

« Même si l’Europe retrouve son autonomie, la relocalisation est loin d’être la solution miracle que tout le monde vante. À tout le moins, cela nécessite des ressources, des compétences, du leadership et une plus grande tolérance et cela nécessite de la part des pays d’accueil qu’ils disposent de la main-d’œuvre et du savoir-faire nécessaires. Créer un tissu industriel dynamique requiert une vision à long terme, un élan politique et la capacité à collaborer avec le secteur privé. La relocalisation ne se décrète pas, elle se construit avec le temps. Cela implique des processus longs et risqués, y compris une réorganisation des chaînes de valeur qui peut prendre des années ».

« Il est essentiel d’adopter une stratégie européenne coordonnée pour réaliser des économies d’échelle et réduire autant que possible les coûts inhérents aux relocalisations. Le moins que l’on puisse dire est que l’Europe ne va pas dans ce sens ».

Un grand retour en arrière

La pandémie de Covid 19 a mis en lumière les limites de la production à flux tendus. À l’avenir, les entreprises s’efforceront de renforcer la résilience de leurs chaînes de production en privilégiant le local. C’est une tendance que l’on peut observer en Australie à tous les niveaux, qui se traduit par une réduction du fossé entre les marchés et l’économie réelle. L’Australie est idéalement placée pour mettre en place et profiter de la croissance diversifiée et inclusive nécessaire à son redressement économique.

Eleanor Creagh, stratégie marché australien chez Saxo, déclare : « L’Australie est une économie ouverte de petite taille, avec des coûts de l’énergie et du travail très élevés et un secteur manufacturier obsolète. Elle est donc parfaitement démunie face à la démondialisation. Tout ou presque dépendra de la réponse politique du nouveau groupe de travail mis en place par le gouvernement fédéral pour réfléchir sur cette problématique ».

« La transition vers l’autosuffisance n’a pas lieu uniquement au niveau des entreprises : elle s’opère également au niveau national et des consommateurs. Le gouvernement a mis en place des incitations en faveur de l’autosuffisance via la relocalisation des capacités de production ».

« Pour l’Australie, l’objectif doit être de tout reconstruire, pas de faire des aménagements au rabais ni de revenir sur les mesures de relance. Le COVID-19 doit servir de catalyseur pour redoubler d’efforts pour revitaliser l’économie et non pas d’excuse pour compter sur la prodigalité de la Banque centrale ».

« Quand on parle de démondialisation et de relocalisation, on oublie souvent le concept d’avantage comparatif. L’Australie a un avantage comparatif évident en matière d’énergies renouvelables et l’impact dévastateur du changement climatique a été plus criant en Australie que nulle part ailleurs. Cela incite clairement à investir à et adopter des mesures de relance pour lutter non seulement contre la crise économique, mais également contre la crise climatique ».

« Les hypothèses qui sous-tendent les prix des actifs depuis quelques années évoluent et sonnent le glas des portefeuilles classiques 60/40. Les produits de taux ne joueront plus le rôle de matelas de protection qui leur était dévolu auparavant au sein des portefeuilles équilibrés, car les taux d’intérêt (et de rendement) sont historiquement faibles et les gains provenant de la convexité dépensés. La tendance en faveur de la démondialisation et l’intérêt croissant pour le concept de souveraineté économique favorise le local par rapport à l’international. La hausse des investissements dans les infrastructures locales, dans la lutte contre le changement climatique et dans le développement durable, dans l’énergie éolienne et solaire, dans la sécurité énergétique et de l’approvisionnement en eau, dans la défense et les infrastructures médicales crée des opportunités dans l’univers des actions : la diversification des portefeuilles s’opère désormais en faveur des métaux précieux, des investissements alternatifs et des actifs corporels ».

Relocalisation, Trump et COVID-19 : les meilleures choses qui sont arrivées à la Chine

La pandémie de COVID-19 et les pressions internationales qu’elle subit en raison de la détérioration de ses relations avec les États-Unis et des troubles sociaux à Hong Kong exposent la Chine à des défis considérables. Ces pressions devraient pousser le pays à innover encore plus et à abandonner son modèle économique dépendant des exportations au profit d’un modèle reposant sur la consommation intérieure.

Kay Van-Petersen, stratégiste macroéconomie mondiale chez Saxo, déclare : « Il y aura naturellement des mesures plus faciles que d’autres à prendre et nous assisterons à une reprise de la demande à mesure que l’activité économique reprendra, mais il y a aura également des risques, qu’il s’agisse d’une deuxième vague pandémique, de nouvelles mesures de confinement ou autre ».

« On peut déclarer avec sans avoir trop peur de se tromper que les politiques monétaires et budgétaires accommodantes mises en œuvre aux quatre coins du monde sont vouées à perdurer pendant longtemps. La liquidité est actuellement le principal facteur de la hausse des prix des actifs dans un contexte caractérisé par des fondamentaux en berne. Tôt ou tard, la situation finira par s’inverser, mais cela pourrait prendre entre 6 ou 18 mois, voire des années ».

« La Chine est confrontée à divers défis et à une forte adversité, qu’il s’agisse des conséquences économiques de la pandémie de COVID-19, de la dégradation des relations avec les États-Unis, du soutien de l’occident à Hong Kong et de la condamnation de Pékin ou de trouver le responsable de tout ce chaos une fois que la pandémie sera derrière nous ».

« Cela étant, l’adversité permet aux pays qui y sont confrontés de devenir plus résilients et d’innover davantage. Elle leur permet d’exprimer le plein potentiel. Donald Trump et le COVID-19 sont les meilleures choses qui pouvaient arriver à la Chine et cela aura des conséquences positives pour le reste du monde car Pékin va tout mettre en œuvre pour accélérer la transition d’une économie reposant sur les exportations à une économie reposant sur la consommation intérieure. Il s’agira de faire avancer les plans de la Chine pour la période 2025-2035, qui portent sur les technologies, la progression dans la chaîne de valeur et le développement des infrastructures technologiques. Enfin, cela permettra à la Chine d’ouvrir ses marchés et d’accélérer les réformes qu’elle tardait à mettre en œuvre à cause de sa dépendance aux exportations ».

Next Finance , Juillet 2020

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