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Phase II : le marché européen du CO2 mis à l’épreuve

Que devons-nous en retenir en matière de fonctionnement et de régulation du marché européen du CO2 ?

La fin de la période d’apprentissage de 2005 à 2007 n’a pas marqué la fin de la mise à l’épreuve du système européen d’échange de quotas de CO2, avec les retombées des crises financière et économique depuis 2008, la mise en évidence de fraudes et des annulations de décisions de la Commission européenne en matière d’allocation en fin 2009. Que devons-nous en retenir en matière de fonctionnement et de régulation du marché européen du CO2 ?

Tout d’abord, les fondamentaux du marché ont plus que jamais déterminé les prix du quota de CO2. En 2008 et 2009, le marché européen du CO2 a subi les conséquences directes du ralentissement de l’activité économique et de la crise financière. Le prix du quota s’est ajusté en conséquence en passant de 29 e en juillet 2008 à moins de 8 e en février 2009. Sur cette période, les industriels soumis aux obligations de conformité ont vu s’amenuiser leurs carnets de commande et leurs besoins projetés en quotas par la même occasion. Au plus fort de la crise, les quotas ont été revendus massivement afin de couvrir les besoins de trésorerie. Mi-février 2009, un retournement de situation s’amorce et les prix repartent à la hausse sur fond d’atténuation de la crise économique et de prise en compte des contraintes de long terme.

Au-delà de la crise économique, le système européen a dû faire face à plusieurs fraudes. Les fraudes au carrousel révélées en 2009 et les récentes arnaques à l’hameçonnage de comptes dans les registres témoignent d’un besoin de régulation et de surveillance du marché. Si ces deux types de fraudes ne sont pas spécifiques au marché du carbone, elles ont accru les suspicions autour de ce système de régulation des émissions encore jeune. Ainsi, la « fraude au carrousel » (non restitution aux Etats membres de la TVA collectée lors de la vente de quotas) a été estimée à plus de 5 milliards d’euros par Europol. La plupart des Etats membres ont rapidement mis en place des exonérations ou modifié les modalités de collecte de la TVA sur les quotas. Dans le cas des tentatives d’hameçonnage, c’est la Commission européenne et les teneurs de registres qui ont tiré la sonnette d’alarme. Les questions de coordination et d’harmonisation des réglementations, au coeur des débats et de projets de directives sur les marchés financiers à Bruxelles, sont plus que jamais d’actualité.

Enfin, le système européen d’échange de quotas continue d’essuyer les critiques de fond. A en croire ses détracteurs, d’autres régulations économiques, comme la taxe carbone ou l’instauration d’un prix plancher du CO2, permettraient de mieux gérer l’instauration d’une contrainte sur les émissions. La crise économique a toutefois souligné l’importance de ne pas figer un coût du carbone plus élevé que nécessaire. Les marchés de quotas permettent d’ajuster la contrainte de réduction requise et le prix du quota en fonction des émissions, qui découlent de l’environnement économique. Maintenir un niveau de contrainte de réduction et s’assurer qu’aucun industriel n’y déroge doit rester l’objectif premier. C’est ce à quoi s’est efforcée la Commission européenne en faisant appel en décembre dernier de deux jugements du Tribunal européen de première instance remettant en cause sa décision dans les plans d’allocation de quotas estonien et polonais. Près de 8 % de l’allocation de la période 2008-2012 est en jeu. Résultats courant 2010.

Rappelons que l’efficacité de ce marché sera jugée sur l’atteinte de ses objectifs environnementaux à moindre coût. Pour cela, le prix doit continuer de répondre à des fondamentaux physiques et diffuser un signal prix incitant aux réductions d’émissions. Cette incitation passe forcément par la crédibilité du système et la transparence vis-à-vis des participants au marché et de l’ensemble de la société.

Réguler le marché est une nécessité : cela ne signifie pas pour autant administrer le système des quotas au risque de lui faire perdre toute sa flexibilité.

Morgan Hervé Mignucci , Février 2010

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