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N’imputez pas la hausse des prix de l’électricité au seul CO2

Si certains accusent le mécanisme européen de tarification du carbone d’être à l’origine de la flambée des prix de l’électricité, la cause est beaucoup plus évidente : c’est la fluctuation des prix du gaz naturel.

Depuis que l’économie européenne se remet de la pandémie, nous avons observé une reprise de la demande d’électricité. Ces dernières semaines, les prix de l’électricité ont fortement augmenté, de même que ceux du gaz naturel et du carbone. Malgré l’augmentation substantielle des prix des émissions de carbone dans l’UE, qui ont dépassé 60 €/tonne en septembre 2021, c’est le prix du gaz naturel qui a le plus contribué à la hausse des prix de l’électricité, comme le montre notre "graphique de la semaine". L’augmentation des prix du gaz naturel est due à une combinaison de facteurs, notamment la forte augmentation de la demande mondiale de gaz, les contraintes d’approvisionnement en gaz naturel liquéfié (GNL) et les exportations de gaz plus faibles que prévu de la Russie vers l’Europe, ce qui entraîne une concurrence accrue entre l’Europe et l’Asie pour le GNL. Avec une demande de gaz qui devrait augmenter au cours de l’hiver pour le chauffage, des stocks inférieurs à leur moyenne historique et des blocages d’approvisionnement, la pression à la hausse sur les prix de l’électricité devrait se poursuivre au cours des prochains mois. La forte hausse des prix a également contraint plusieurs petits fournisseurs d’énergie au détail au Royaume-Uni à cesser leurs activités, impactant ainsi presque 1,2 million de foyers britanniques.

Le gaz naturel joue un rôle essentiel dans le mix électrique européen. Les turbines à gaz à cycle combiné (TGCC) représentent la technologie de production par défaut des centrales électriques à gaz, en raison de leur efficacité relativement élevée et de leur flexibilité opérationnelle, et sont les « price maker » sur la plupart des marchés européens de l’électricité, dans un contexte d’augmentation de la part de la capacité intermittente des énergies renouvelables. Par conséquent, les variations des prix du gaz naturel ou du CO2 se reflètent largement dans les augmentations des prix de l’électricité de base. Les exploitants de TGCC bénéficient ainsi d’une couverture de prix intrinsèque, mais les utilisateurs finaux restent exposés à la volatilité des prix de l’électricité. Néanmoins, de nouvelles hausses brutales des prix du gaz naturel pourraient soutenir la production de charbon à court terme, malgré les politiques de décarbonation et le fait que le charbon soit deux fois moins économe en carbone que le gaz naturel.

Le gaz naturel est appelé à jouer un rôle clé en tant qu’énergie de transition au cours de la prochaine décennie. Bien que les déséquilibres actuels entre l’offre et la demande de gaz devraient s’atténuer au cours de l’année 2022, la dynamique actuelle des prix de l’électricité met en évidence la nécessité stratégique de disposer d’un approvisionnement et d’un stockage prévisibles du gaz pour tempérer la volatilité des prix de l’électricité. La dynamique actuelle des prix de l’électricité contribue également à une transition plus rapide vers les énergies renouvelables. Dans un contexte de hausse des prix de l’électricité, le prix moyen d’un accord d’achat d’électricité (AAE) sur 10 ans en Europe a récemment atteint 55 €/MWh, soit une augmentation de 46% par rapport à l’année dernière, ce qui pousse de plus en plus les énergies renouvelables européennes vers une parité réseau. À long terme, une part sensiblement plus élevée d’énergie renouvelable couplée au stockage d’électricité et d’hydrogène vert pourrait, selon nous, contribuer à réduire les prix de l’électricité en Europe. Ou pour le dire autrement : les prix élevés actuels de l’électricité sont en grande partie le résultat de facteurs conjoncturels (gaz) et non structurelles (taxes sur le CO2). Nous pensons que les premières vont perdurer à moyen terme.

Gianluca Minella , Octobre 2021

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