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ESG 2.0

Aujourd’hui, il est essentiel de lier investissement et lutte contre le changement climatique et cette démarche prendra à l’avenir de plus en plus d’importance puisque le changement climatique représente un des enjeux majeurs auquel doit faire face l’humanité aujourd’hui.

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Voyons les choses en face, le changement climatique constitue un enjeu vital pour l’humanité aujourd’hui. Tous, y compris les gouvernements, les industries des secteurs public et privé, les organisations sociales et les particuliers, prennent part à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Les investisseurs du monde entier ont également rejoint cette lutte contre le changement climatique. Pourquoi les investisseurs ? Parce qu’ils peuvent jouer un rôle essentiel et qu’ils peuvent être très influents sur le fonctionnement des entreprises. L’investisseur choisi les entreprises qu’il souhaite financer et détenir. De plus, il peut amorcer certains changements au niveau de l’entreprise à travers son engagement. Il y a eu notamment des évolutions très positives grâce à plusieurs initiatives d’investisseurs telles que Climate Action 100+ et les lettres aux investisseurs du CDP (Carbon Disclosure Project).

L’investissement durable et responsable génère également de meilleurs rendements. Une enquête réalisée en 2015 sur la base de 3700 études, dont 2200 représentant des situations empiriques indépendantes, a analysé la relation entre les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et la performance financière des entreprises et a permis d’établir plusieurs preuves d’une meilleure rentabilité des investissements ESG. Cette étude intitulée « ESG and Financial Performance » (publié par Journal of Sustainable Finance and Investment) souligne que : « l’orientation vers des investissements responsables à long terme devrait être essentielle pour tout types d’investisseurs rationnels afin de remplir leurs obligations fiduciaires et d’aligner au mieux les intérêts des investisseurs avec les objectifs d’intérêt général de la société ».

Un enjeu majeur !

Actuellement, la plupart des grands investisseurs ont déjà bien intégré les critères ESG à leurs processus d’investissement. Selon certains rapports, un ensemble de gérants actions, obligataires et d’autres classes d’actifs représentant 83 milliards $ ont déjà adhéré aux Principes pour l’investissement responsable des Nations Unies (PRI UN), encourageant l’intégration des critères ESG dans leur allocation d’actifs. On estime que les fonds ESG dans le monde sont passés de seulement 140 en 2012 à plus de 370 l’an dernier. Au cours de cette période, les actifs gérés par les fonds ouverts ESG ont augmenté de près de 400 milliards $ et ont franchi la barre des 1 000 milliards $ l’année dernière.

A mesure que l’ESG devient un élément central de l’investissement, il est nécessaire de réviser et de standardiser les reportings et les notations ESG. Aujourd’hui, ces critères ESG varient selon les pays, les juridictions, les entreprises, les agences de notation et les investisseurs. En outre, les investisseurs ont des approches différentes en matière d’ESG. Par exemple, le Fonds Souverain norvégien aurait, selon certaines informations, choisi de retirer de ses investissements les entreprises dans le secteur du charbon et de l’énergie, alors que le Fonds de pension japonais défend une position totalement différente sur ce sujet. Il pense justement qu’il faut « s’engager auprès des entreprises pour améliorer les paramètres ESG plutôt que de se départir complètement de leurs activités ».

Poudre aux yeux

Il reste des défis à relever tant pour les investisseurs que pour les entreprises. Vous ne pouvez pas avoir les mêmes paramètres de reporting ou de notation ESG pour des entreprises opérant dans des secteurs différents, car les questions importantes relatives à l’ESG diffèrent selon les secteurs et même selon les entreprises. Par exemple, une entreprise peut avoir un impact via sa production dans une région où la rareté de l’eau est un réel problème, alors que d’autres entreprises, même dans le même secteur, pourraient ne pas être exposées aux mêmes risques.

De la même manière, la fiabilité et la collecte des données est une question centrale du point de vue des investisseurs. Il existe des fournisseurs de services qui réalisent les notations ESG pour les investisseurs. Mais cela varie en fonction des différents organismes, de leurs approches et de leurs méthodologies. Nous risquons donc de nous retrouver dans une situation où une agence de notation ESG évalue une société avec des notes élevées alors qu’une autre évaluera cette société avec des notes plus faibles.

Un rapport de l’American Council for Capital Formation souligne qu’outre les biais géographiques et subjectifs, il existe un biais institutionnel dans les notations ESG car chaque agence tente d’appliquer une approche originale dans leurs notations ESG, en ignorant les différences entre les profils de risque propres à chaque secteur et à chaque entreprise. Le rapport intitulé « Ratings That Don’t Rate : The Subjective World of ESG Rating Agencies » explique que les grandes entreprises obtiennent de meilleures notations ESG car elles peuvent investir davantage dans les référentiels ESG. Les petites et moyennes entreprises ont tendance à être moins bien notées à cause de ce biais. Ajoutez à cette liste les incohérences entre les différentes agences de notation et vous obtenez un possible échec dans l’identification des risques, y compris de « greenwashing » (une pratique qui surestime les engagements ESG) pour bénéficier d’une meilleure adhésion aux critères ESG.

Un fondement commun

Les experts estiment que nombre de ces problèmes peuvent être résolus par la normalisation des normes ESG. La Commission Européenne a récemment fait un pas important dans cette direction. Dans le cadre de son plan d’action pour la finance durable, elle a publié un ensemble de lignes directrices sur le reporting climat des entreprises afin que le secteur financier et les capitaux privés puissent jouer un rôle essentiel dans la transition vers une économie durable et y apporter les financements nécessaires. Ces lignes directrices fournissent des orientations à près de 6000 sociétés cotées dans l’UE, y compris les banques et les compagnies d’assurance qui sont tenues de publier des informations non financières. La Commission Européenne a également publié une proposition de règlement pour établir un cadre visant à faciliter l’investissement durable (règlement taxonomique).

La Commission européenne a ainsi pris un bon départ pour encourager les entreprises à utiliser le cadre de reporting TCFD (Task Force on Climate-related Financial Disclosures) afin de fournir des informations plus transparentes aux investisseurs sur le changement climatique. Bien sûr, puisque le règlement n’est pas juridiquement contraignant, il sera intéressant de voir combien d’entreprises commenceront à utiliser ces nouvelles lignes directrices. Chez Evli, nous allons veiller à ce que le changement climatique soit pris en compte dans nos processus d’investissement. Ces lignes directrices appuieront notre travail en nous fournissant des données plus fiables.

Cette démarche de la Commission européenne est ici essentielle puisque les investissements liés aux critères ESG devraient exploser dans les années à venir. Un livre blanc publié en 2019 par le Forum économique mondial prévoit que « la vague de l’investissement liées aux critères ESG devrait continuer de croître et rien n’indique qu’elle risque de s’atténuer ».

Outi Helenius , Juillet 2019

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