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Marchés des Capitaux

Danone, le sacrifice des marges au profit des volumes

Le leader mondial de la distribution de produits laitiers est confronté à l’érosion de sa marge opérationnelle, impactée par le coût des matières premières et la difficulté à passer des hausses de prix dans un contexte dégradé. Retour sur les fondamentaux et les perspectives de ce poids lourd de la cote française, considéré par les investisseurs comme une valeur défensive par excellence. A juste titre ?

A l’instar d’autres groupes d’envergure internationale exposés à la consommation, Danone traverse logiquement une période délicate. Si le numéro un des produits laitiers et de l’eau a publié un bénéfice net et un chiffre d’affaire en progression au premier semestre, de respectivement 2.3% (à 881 M€) et 7.7% (à 10.475Mds€), son activité a été en partie impactée par la dégradation rapide de la consommation en Europe, tout particulièrement en Espagne. Il s’agit là d’une préoccupation majeure pour la direction du groupe, qui s’attend à un second semestre du même acabit en Espagne, un marché historiquement important pour Danone sur le segment des produits laitiers. La demande ibérique représente en effet 8% du chiffre d’affaires total de Danone et plus de 10% des profits.

L’exposition du groupe à la conjoncture économique ibérique a ainsi fortement contribué au coup de frein des marges de Danone, ce qui avait d’ailleurs justifié un profit warning en juin. Autre facteur pesant, l’inflation des matières premières constatée depuis le début de l’année n’est pas compensée par le plan de réduction des coûts de 500 M€ par an mené par l’entreprise.

Ce tableau aurait-il de quoi inquiéter les actionnaires de Danone ? Pas vraiment, tant les perspectives du groupe à long terme sont orientées positivement.

Rappelons tout d’abord que l’affaiblissement des marges est aussi le résultat assumé des choix stratégiques de la direction depuis quelques années. L’objectif est de gagner en rentabilité en sacrifiant les prix au profit des volumes de ventes. C’est le sens du programme « Reset » lancé en 2008, qui a fait de la compétitivité des prix une condition nécessaire à la préservation d’un niveau de croissance organique élevé.

C’est notamment ce qui a permis à Danone de résister en 2009, année noire pour le secteur : la baisse des prix des produits du groupe, de l’ordre de 2.3%, a permis l’envol des volumes de vente, de +5.2% et donc le maintien d’une croissance positive.

Rappelons ensuite que Danone conserve de fortes perspectives de croissance sur la plupart des zones géographiques et sur plusieurs des segments de son activité agroalimentaire. Sur le marché domestique tout d’abord, où son positionnement de leader est moins concurrencé par les marques de distributeurs et où le poids de la nutrition infantile et médicale, catégories très robustes, est plus important qu’en Espagne. Dans les pays émergents ensuite, fervents consommateurs des marques du groupe (eaux en Indonésie, produits laitiers en Egypte et au Brésil) et qui représentaient 51% du chiffre d’affaire global de Danone en 2011. En Russie, Danone a opéré une fusion de ses marques de produits laitiers frais avec l’acteur local Unimilk en 2010. Si ce rapprochement s’est révélé dilutif les premières années, en raison de la rationalisation des portefeuilles de marques des deux entités, il semble que Danone soit aujourd’hui en mesure de redresser ses marges et sa rentabilité en Russie, un pays qui représente 11% du chiffre d’affaire global.

Quant aux Etats-Unis, il s’agit du marché où le taux de pénétration de Danone a le plus de marge de progression (les USA figurent seulement au 25èmerang mondial en termes de consommation de produits laitiers par habitant !). Par exemple, le yaourt à la grecque « Oikos » y connait un succès phénoménal et sa capacité de production sera doublée au second semestre. A lui seul, ce produit représente un chiffre d’affaire de 300 M$ en 2012 (contre 100M$ en 2011) et pèse un point de croissance à l’échelle du groupe.

Compte tenu de ses fondamentaux et de la visibilité de sa croissance à long terme, nul doute que Danone restera une valeur recherchée par les investisseurs boursiers.

Certes, la valorisation boursière du titre peut paraître élevée par rapport au reste du marché, à 15x les résultats 2013. Mais à y regarder de plus près, elle présente en réalité une décote historiquement élevée par rapport aux autres valeurs du secteur. Elle reste aussi largement inférieure au P/E moyen historique du groupe, valorisé à 18.3x sur les 10 dernières années.

A court terme, Danone semble avoir bien identifié ses problématiques en Europe du sud et le profit warning est désormais derrière nous. Autre facteur encourageant, les prix des matières premières devraient baisser au second semestre. A plus long terme, les catégories de produits sur lesquelles le groupe est présent vont continuer de croître à un rythme supérieur au reste du marché agroalimentaire. C’est notamment le cas des produits de nutrition infantile et médicale, qui répondent à des besoins relevant de vraies tendances structurelles. Enfin, la baisse actuelle du pricing power de Danone semble davantage conjoncturelle que structurelle !

Frédéric Ponchon , Septembre 2012

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