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Opinion
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Nous ne conclurons donc pas du tout en affirmant qu’il est préférable de faire du high-yield que de l’investment-grade mais plutôt en suggérant que le risque est différent mais pas plus ou moins élevé sur l’un que sur l’autre pour la performance finale de l’investisseur...
Alors que les investisseurs français se retrouvaient cette semaine à leur traditionnelle réunion lyonnaise, les marchés ont continué le chemin, entamé depuis quelques semaines sur deux fronts contredisants chacun le consensus du début d’année qui commence bel et bien à se réorienter, par la force des choses :
Bref une semaine relativement normale durant laquelle les entreprises ‘high yield’ se sont activées pour parer à la hausse des taux avec des atouts et des méthodes différentes mais permettant toutes d’abaisser le coût de financement plutôt que de se présenter au marché telles qu’elles le faisaient lors des précédentes émissions obligataires, alors que les taux de base étaient proches de zéro. Encore une fois cette semaine donc les catalyseurs du marché du high yield, entre portage et agilité des entreprises, ont permis aux détenteurs de cette catégorie obligataire de réaliser de meilleures performances que les indices investment grade, ballotés de plus en plus violemment par la hausse des taux et approchant dangereusement d’une performance négative pour l’année 2023 ; les indices souverains y étant déjà…
Pour conclure nous réaliserons une petite simulation pour comparer un pic de défauts dans le marché du high yield européen à un écartement modéré des taux et/ou des spreads. En effet, depuis plusieurs mois, de nombreux investisseurs nous interrogent et s’inquiètent des défauts d’entreprises et donc de potentielles moins-values sur les fonds qui en détiennent. Et pourtant…
Tout d’abord, un défaut en tant que tel ne signifie pas nécessairement qu’un investisseur du marché secondaire perde de l’argent, sans même parler des fonds spécialisés dans les restructurations obligataires. Tout dépend du prix auquel on achète l’obligation et des coupons qu’on a pu toucher entre temps : ainsi un investisseur achetant une obligation à 60% du nominal, touchant un coupon de 7% pendant les trois premières années et subissant un défaut la quatrième année avec une valeur de recouvrement à 40%, n’aura finalement rien perdu en capital.
Passons enfin à notre simulation de deux portefeuilles qui nous permettra de répondre à la question : vaut-il mieux avoir 5% de défauts dans un portefeuille ou un écartement de 50 points de base de taux ?
A priori, 5% de défauts est assez pénalisant et beaucoup d’investisseurs seraient à même de le reprocher à un gérant puisque ce chiffre est colossal sur le marché obligataire européen (plus de deux fois le niveau de défauts de la crise de 2008-2009 en Europe) et a priori pénalisant pour le rendement. En revanche 0.5% d’écartement de taux est un chiffre qui vient précisément de se produire sur les semaines passées sur les taux sans que personne ne sourcille…
Ces deux positionnements représentent à peu près les indices obligataires des deux catégories. Imaginons maintenant que les deux scénarios se passent à horizon 1 an, toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire notamment que les défauts viennent uniquement de mauvais choix du gérant et ne provoquent pas d’écartement généralisé des taux du marché. Nous imaginerons également que l’investisseur achète toutes ses obligations à 100%, ce qui est rare actuellement sur le marché secondaire qui bénéficie déjà d’une décote de près de 10% sur le high yield.
Premier portefeuille : 7% x 95% (portage de 7% sur 95% du portefeuille) – 70% x 5% (5% de défauts achetés à 100% avec une recovery à 30%) = 3.15% de performance à horizon 1 an
Second portefeuille : 4.3% (portage) – 100% x 0.5% x 5 (écartement de 50bps sur tout le portefeuille avec sa sensibilité de 5) = 2.5% de performance à horizon 1 an
Rappelons encore que le pic potentiel de défaut attendu en Europe est plutôt de 2% à 3% sur le high yield pour les deux ans à venir (tandis que nous avons simulé un scénario prudent avec 5%) tandis que les taux longs sont encore entre 50 et 100 points de base en deçà des taux de la BCE, ce qui pourrait bel et bien entraîner un écartement de cet ordre de grandeur.
On constate ainsi que si le mot « défaut » effraie et empêche une partie des investisseurs de se positionner sur le marché du high yield en général, il ne pénalise qu’une portion congrue d’un portefeuille et est souvent largement compensé par le portage des autres signatures et l’idiosyncrasie naturelle des émetteurs de cette portion de marché. La diversification, l’analyse et la flexibilité d’un fonds, notamment la capacité et l’agilité de pouvoir céder des positions avant un défaut formel, peuvent aussi contribuer à limiter son impact, ce qui n’a pas été intégré pour amortir notre scénario. A l’inverse les mouvements de taux, à l’opposé de la composante crédit, impactent la totalité d’un portefeuille de haute qualité dont la prime de crédit est faible et le pilier ‘macro’ et ‘taux sans risque’ est plus élevé.
Nous ne conclurons donc pas du tout en affirmant qu’il est préférable de faire du high-yield que de l’investment-grade mais plutôt en suggérant que le risque est différent mais pas plus ou moins élevé sur l’un que sur l’autre pour la performance finale de l’investisseur, chiffre bel et bien le plus important lorsqu’on réalise son allocation d’actifs, plus que la terminologie des mots qui peut parfois être inquiétante … mais trompeuse.
Matthieu Bailly , Octobre 2023
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