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La correction d’octobre a remis les pendules à l’heure

Cette correction a eu deux mérites : réduire les valorisations des actions les plus chères et amener les investisseurs à davantage intégrer le risque de ralentissement économique. Pourtant, l’évolution des fondamentaux de l’économie et de l’activité des entreprises, qui ne se sont que légèrement dégradés, ne permet pas d’affirmer que ce mouvement va s’amplifier.

En revanche, les marchés sont plus conscients du risque récessif découlant de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine. Heureusement, les négociations entre les deux pays continuent ainsi qu’avec le Japon et l’Europe. Et l’issue sans surprise des élections américaines est jugée positive par les marchés. C’est pourquoi le rebond des indices boursiers, encore hésitant, pourrait se prolonger, non sans volatilité, pendant quelques mois. Mais, il ne permettra pas de dépasser les récents points hauts de cette année sans un retour plus marqué de la confiance dans une croissance plus soutenue. Les actions ont retrouvé un potentiel de hausse mais celui-ci est plus limité. Le repli des marchés en octobre a donné l’opportunité d’acheter des actions dans de bonnes conditions. Si l’occasion se présente à nouveau dans les prochains jours, il faudra la saisir.

Comme en début d’année, la correction a commencé avec la hausse des taux longs américains qui a fait reculer les grandes valeurs les mieux valorisées, particulièrement les entreprises technologiques ou du luxe. Par la suite, pendant la période de publications des résultats trimestriels, les messages de prudence, délivrées par les entreprises les plus sensibles à l’activité économique et aux échanges mondiaux, ont inquiété les investisseurs. La question de la fin du cycle économique américain et du pic des marges des entreprises s’est à nouveau posée. La correction amorcée n’était-elle pas annonciatrice d’un fort ralentissement ? Pouvait-elle se transformer en crise boursière ? La rapidité et l’ampleur de la baisse avaient de quoi être préoccupantes en effet. Mais heureusement, les conditions techniques des marchés ont finalement arrêté la chute. Et après avoir mieux analysé les raisons de celles-ci, les investisseurs en ont conclu qu’il y avait eu un excès de baisse des cours et ont commencé à racheter des actions.

Un apaisement des tensions commerciales avec la Chine, sous la forme d’une entrevue à venir lors du G20 de fin novembre et le repli des cours du pétrole ont eu un effet d’entrainement supplémentaire et plus récemment, l’issue des élections américaines a apporté également un soulagement. Revenons rapidement sur tous ces points.

La croissance mondiale connait un petit ralentissement, essentiellement dans l’industrie, mais il est très inégal selon les pays.

L’expansion reste vigoureuse aux Etats-Unis, comme l’a encore relevé la FED qui continuera à relever graduellement ses taux. Les risques de dérapage inflationniste ne sont pas manifestes en dépit de la hausse des salaires. Certes, les entreprises américaines ont des marges très élevées et celles-ci ont commencé à baisser. Mais cela n’est pas une condition suffisante pour faire baisser les profits ou générer un arrêt de la hausse de Wall Street. De plus, une reprise bénéfique des investissements et de la productivité ne peut être exclue, ce qui permettrait de prolonger le cycle de croissance. Les résultats des entreprises pourront encore progresser à un rythme plus modeste. Il n’y a aucun signal précurseur de récession aux Etats-Unis. La principale menace pour l’année 2019 reste celle du protectionnisme et des droits de douane qui peuvent être imposés sur la totalité des exportations chinoises. Dans un premier temps, l’impact éventuel avait été jugé assez faible par les investisseurs mais ceux-ci ont montré en octobre qu’ils pouvaient changer d’avis assez rapidement… L’apaisement actuel n’est peut-être que passager.

Les élections de mi-mandat ont permis au Parti Démocrate de regagner le Congrès. Cela n’empêchera pas Donald Trump de garder toutes ses prérogatives dans le domaine du commerce extérieur et des droits de douane. En revanche, les Républicains ont conservé leur majorité au Sénat, ce qui réduit les risques de harcèlement judiciaire du Président. Enfin, la cohabitation va obliger les deux partis et le Président à s’entendre pour élaborer les budgets et les projets de loi. La hausse des dépenses publiques et la dégradation du déficit budgétaire devraient donc s’atténuer ce qui pourrait calmer les ardeurs de la FED. En clair, la remontée des taux pourrait être ralentie ou suspendue plus rapidement en cas de nécessité, et ce d’autant que l’inflation reste maitrisée pour l’instant. C’est un facteur de soutien pour les marchés. Enfin, il n’est pas exclu que le projet de relance dans les infrastructures du pays puisse aboutir. Finalement, ce résultat électoral vient quelque peu contrebalancer le risque protectionniste.

En Europe, la croissance ralentit toujours et elle reste handicapée par plusieurs facteurs. Le maintien du projet de budget italien, jugé non conforme par Bruxelles, et l’affaiblissement politique de la Chancelière allemande ne permettent pas d’envisager une amélioration du climat des affaires domestiques. Par ailleurs, l’imbroglio du Brexit reste entier et fait perdre un temps précieux aux fonctionnaires européens, outre le risque qu’il fait peser sur la croissance anglaise et l’activité des entreprises européennes concernées. L’apaisement des tensions commerciales devient crucial pour la croissance européenne.

La croissance des pays émergents est toujours assez forte globalement mais elle tend aussi à ralentir. Cependant, quelques signaux positifs viennent d’apparaitre au Brésil à l’issue des élections présidentielles mais aussi en Russie et en Inde. En revanche, l’activité en Chine continue à s’affaiblir. Mais les mesures de soutien engagées par les Autorités du pays devraient produire leurs effets dans les prochains mois et compenser partiellement l’impact de la guerre commerciale. La situation des pays émergents ne devrait donc pas se dégrader aussi vite que les marchés l’ont craint.

Le retour des sanctions américaines envers l’Iran n’a pas provoqué la crise redoutée. En autorisant finalement les exportations iraniennes vers quelques pays dont la Chine, le Japon, la Corée, l’Inde ou l’Italie, Donald Trump a effacé les risques de déséquilibres d’offre et de demande sur le marché pétrolier. Le repli des cours du pétrole qui s’en est suivi est une bonne chose pour les consommateurs et pour l’inflation. C’est un facteur de risque qui s’éloigne des marchés financiers.

La valorisation des marchés actions s’est détendue, que ce soit en termes de multiple des résultats (PER) ou de valorisation par rapport aux obligations (la prime de risque). Ils sont donc un peu moins risqués et offrent à nouveau un potentiel de redressement. Mais l’incertitude qui pèse sur l’activité et sur la croissance des résultats bloquera sans doute le rebond des cours, probablement à l’approche des plus hauts niveaux de cette année. En résumé, le risque de forte baisse s’est réduit mais le potentiel de hausse également, du moins pour l’instant.

Dans notre dernière lettre, nous attendions des opportunités d’achat. Le mois d’octobre nous en a apporté. Traditionnellement après une forte correction, les indices rebondissent non sans rester encore hésitants. L’essentiel de la baisse a sans doute été fait. Mais Il n’est pas exclu qu’après un rebond de 5%, les indices marquent une pause et rebaissent un peu. Cela serait une nouvelle occasion de renforcer les positions en actions pour jouer la poursuite d’une reprise qui pourraient ramener les indices à des niveaux proches des plus hauts de cette année.
En revanche, celle-ci ne permettra pas de dépasser ces niveaux sans un retour plus marqué de la confiance des investisseurs dans une croissance plus soutenue. Il est encore un peu tôt pour se prononcer sur ce point tant les aléas sont nombreux. L’évolution des marchés financiers en 2019 en dépendra.

Nous avons sensiblement abaissé nos prévisions pour la fin de l’année et plus modestement pour la fin-juin 2018. Compte tenu du rebond des derniers jours, le potentiel d’appréciation d’ici à la fin de l’année est d’environ 5% en Europe et de 4% aux Etats-Unis.

Nous avons conservé notre recommandation globale sur les actions, toujours Neutre à court terme et Surpondérer à moyen terme. Mais nous avons profité de la correction pour relever notre position à court terme sur les actions américaines à Surpondérer et celles sur les actions émergentes d’Amérique Latine et d’Europe de l’Est à Neutre.

Nous avons relevé nos recommandations sectorielles à court terme à Neutre pour les secteurs Distribution et Télécommunications et à moyen terme à Surpondérer sur les secteurs Santé et Assurance. Nous avons abaissé nos recommandations à court et moyen terme sur le secteur Biens et Services Industriels à Neutre.

Nous conservons notre opinion Neutre sur les produits obligataires à court terme et Sous pondérer à moyen terme. Nous n’avons abaissé notre recommandation à moyen terme sur les obligations convertibles à Neutre.

Dans notre allocation équilibrée, nous avons maintenu une position prudente à court terme. En fin de mois, nous avons relevé tactiquement la pondération des actions de 1.2% sur les Etats-Unis et l’Europe. Nous avons réduit le poids des liquidités et des produits de multi-stratégie obligataires.

Vincent Guenzi , Novembre 2018

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