Investir dans les infrastructures

L’état de vétusté des infrastructures dans les pays développés ainsi que les besoins croissants en infrastructures dans les pays émergents présagent d’un besoin croissant en capital. A une période où les sources de financement traditionnelles se tarissent, des opportunités pour les investisseurs sont créées.

Tous les pays, grands et petits, sont au seuil de grands bouleversements pour les décennies à venir. Les changements de réglementation, les ressources renouvelables, les droits des clients, les infrastructures et les finances, la technologie et la formation représentent les défis de demain. Ceux qui voient déjà ces grandes tendances et qui développent des stratégies pour composer avec ces facteurs seront plus productifs à court terme et augmentent leur capacité de survie.

Dans le monde actuel en constante mutation, tous les pays doivent apprendre à s’adapter pour l’avenir. Dans les pays développés, la crise financière de 2008 a débouché sur une « nouvelle réalité » de chômage de masse durable, de réglementation renforcée et de faibles taux d’intérêt. Sur les marchés émergents, on pressent un ralentissement de la croissance étant donné le contexte d’incertitude économique, politique et même social. On ne peut prédire l’évolution de la croissance mondiale ; il existe cependant un secteur qui résiste quelle que soit la conjoncture économique : les infrastructures.

Coûteuses et durables

Les infrastructures peuvent se définir de plusieurs manières, mais recouvrent en général les systèmes publics de grande envergure, les services et équipements d’un pays ou d’une région sans lesquels l’économie ne peut fonctionner correctement. Cela comprend les transports, les systèmes de communication, l’eau, la production et la distribution d’énergie, la gestion des déchets et les bâtiments publics, comme les écoles, les bureaux de poste et les prisons. Les infrastructures se caractérisent en général par des coûts de développement accrus, en raison de barrières élevées à l’entrée, et sont gérées et financées à long terme. Cette classe d’actifs se divise en deux groupes principaux : infrastructures économiques et infrastructures sociales.

Le rôle de l’Etat remis en question

On a considéré jusqu’ici que l’Etat devait financer et gérer ces actifs pour le bien de la population. Mais ce rôle est remis en question parce qu’il coûte trop cher aux contribuables et que le secteur public est mis en concurrence avec le privé, jugé plus efficace pour fournir ces services. Du point de vue de l’Etat, la privatisation paraît souhaitable, car l’endettement des partenaires privés pèse sur leur bilan et non sur celui du budget de l’Etat. Ces facteurs ont conduit au transfert progressif de l’exploitation des infrastructures du secteur public vers le privé. Les prestations privées de service prennent différentes formes : joint venture, concession et franchise, voire contrats de livraison. Le secteur privé est surtout actif pour la conception, la construction, le financement ou l’entretien des biens publics, moyennant des versements publics contractuels à long terme ou l’accès aux revenus générés par le bien.

Classification selon le stade de développement

Au sein des catégories économiques et sociales, les infrastructures sont souvent classées en fonction de leur développement. De ce point de vue, il y a traditionnellement des infrastructures « à développer » et « existantes ». Les infrastructures à développer ou « en croissance » désignent des installations nouvelles qu’il faut concevoir, financer, construire et exploiter. Les infrastructures existantes ou « matures » désignent des biens existants, vétustes, qu’il faut rénover. Sur le plan géographique, les infrastructures à développer se trouvent plutôt du côté des marchés émergents ; les existantes, du côté des marchés développés.

Le profil de risque par rapport au rendement des infrastructures dépend de différents facteurs. La tendance à constituer des monopoles naturels est une des caractéristiques principales des infrastructures, ce qui les rend attractives pour les investisseurs. Elles sont généralement soumises à divers degrés de réglementations, dépendant en grande partie du degré de monopole naturel. Cela ne se fait pas forcément au détriment des investisseurs, car une certaine sécurité est donnée quant au rendement escompté. Les réglementations s’appliquant aux revenus de la plupart des activités liées aux infrastructures semblent intégrer des formules de tarification permettant à ces sociétés d’augmenter le prix de leur service au rythme de l’inflation. Ce facteur, combiné à une clientèle captive, tend à affranchir les flux financiers de nombreuses infrastructures des variations du cycle économique.

Plus demandées que jamais

La croissance et l’urbanisation globales, surtout sur les marchés émergents, entraînent des demandes sans précédent d’énergie et de développement des infrastructures. La réglementation renforcée, la croissance continue des villes et l’évolution de la confiance des consommateurs créent un immense besoin en investissements dans les infrastructures. Comme la croissance démographique excède les capacités du système existant, les équipements vétustes doivent être réparés. La gestion de l’eau devient aussi de plus en plus cruciale et nécessite des investissements en infrastructures très importants. Bien que les estimations varient beaucoup, les chiffres les plus bas sont déjà très élevés, alors que des coalitions de professionnels essaient de montrer l’urgence des investissements face aux besoins toujours croissants.

A partir des tendances à long terme et cycliques, les analystes s’attendent à une forte demande en infrastructures. Sur le long terme, ils pensent que l’investissement en infrastructures ne suit pas le rythme de la croissance économique. Ils sont donc convaincus que l’urbanisation et la modernisation entraîneront le développement des infrastructures dans le monde. L’American Society of Civil Engineers estime par exemple à près de 2,2 milliards de dollars US la somme nécessaire pour moderniser les infrastructures américaines au cours des cinq prochaines années.

Des opportunités intéressantes grâce à la privatisation

Les analystes estiment aussi que les gouvernements disposent de ressources limitées, surtout après la Grande Récession, et qu’ils ne peuvent augmenter à la fois l’endettement et les impôts. Ils sont persuadés que la situation peut se poursuivre quelque temps, car ils doutent que les paquets conjoncturels récents suffisent à combler les besoins mondiaux en financement d’infrastructures. En outre, les déficits publics qui explosent pourraient encourager à privatiser lorsque les gouvernements vendent leurs actifs pour réduire leurs déficits.

La demande croissante suscitée par les besoins en capitaux, alors que les capitaux publics sont limités, constitue ainsi une opportunité pour les investisseurs privés. Certains secteurs sont plus ou moins attractifs en fonction des régions, principalement en fonction de l’attitude des gouvernements vis-à-vis des privatisations. Aux Etats-Unis, la production d’électricité est en général privée, mais son transport est public. En Europe, c’est l’inverse. La privatisation de l’énergie a débuté en Europe, alors qu’aux Etats-Unis, on a entrepris de privatiser certains moyens de transport, mais avec des résultats mitigés.

Une certitude dans des temps troublés

L’état de vétusté actuel des infrastructures dans le monde entraîne des besoins grandissants en investissement, résultant de décennies de sous-investissements dans les économies développées, tandis que la croissance économique et l’élévation du niveau de vie nécessitent d’accroître les infrastructures dans les pays émergents. Ces besoins en capital se font sentir alors que les sources traditionnelles de financement sont limitées. La plupart des sources publiques et privées de capital qui financent traditionnellement les infrastructures ne peuvent ou ne veulent plus investir. Ces dynamiques continueront à forcer les Etats à privatiser les infrastructures existantes. Compte tenu de la volatilité économique actuelle, des tensions politiques et du chômage élevé, les infrastructures offrent des débouchés et de la croissance dans une période troublée.

Nicolo Foscari , Yogi Thambiah , Juin 2012

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