Forward guidance et au-delà.

La Forward guidance 2.0 va bientôt être rendu public. Si l’actuelle fragilité des données des Etats-Unis se poursuit au-delà du mois de mars, nous assisterons à une forte hausse des cours des obligations traditionnelles...

L’avalanche de critiques dont fait l’objet la Réserve fédérale américaine est injuste. Contrairement aux idées reçues, la formulation d’objectifs économiques (forward guidance) n’a jamais été une promesse de la part des banques centrales, mais un outil de gestion des prévisions visant à assouplir les conditions financières lorsque l’économie est jugée trop molle. La Forward guidance 2.0 va bientôt être rendu public. Si l’actuelle fragilité des données des Etats-Unis se poursuit au-delà du mois de mars, nous assisterons à une forte hausse des cours des obligations traditionnelles.

Comment agissent les forward guidances des banques centrales ?

Une forward guidance est une description formelle, par une banque centrale, de la manière dont les variables économiques sont prises en compte dans ses décisions concernant l’établissement des taux d’intérêt. Dans ce contexte, lorsque la croissance est molle, le marché peut se permettre d’ignorer les changements de données économiques à court terme s’il constate que les niveaux sont loin des seuils fixés par la banque centrale.

La réaction des marchés aux surprises économiques est donc délinéarisée.

En bref, les forward guidance des banques centrales permettent de maintenir la souplesse des conditions financières en réduisant la sensibilité des taux aux bonnes surprises.

Lorsque les banques centrales des Etats-Unis et du Royaume-Uni ont commencé à formuler des forward guidances fondées sur le taux de chômage, ces dernières étaient loin des seuils qu’elles s’étaient fixées. La sensibilité des taux aux surprises économiques importantes était donc faible. Avec l’accélération de la baisse du taux de chômage tout au long de 2013, cette sensibilité s’est accrue, d’autant qu’au même moment, la Fed s’est concentrée sur le ralentissement de son programme d’achat d’actifs, ce qui a nettement resserré les conditions financières.

Changement de cap

Pourquoi la Fed et la Banque d’Angleterre décident-elles de modifier leur forward guidance maintenant ?

La Fed comme la Banque d’Angleterre établissent et formulent leurs prévisions à partir du taux de chômage. Le taux de chômage a nettement diminué dans les deux pays, et la raison de cette baisse fait l’objet d’un point de politique monétaire litigieux (en particulier aux Etats-Unis), étant donné la baisse du taux d’activité.

Aux Etats-Unis, le taux d’activité a baissé de 3,1% depuis mi-2008 (en raison de variations démographiques et de facteurs cycliques) ; cette baisse explique en grande partie celle du taux de chômage. Les banques centrales débattent du rôle des facteurs cycliques et structurels dans ces baisses.

C’est la raison pour laquelle Ben Bernanke et plus récemment Janet Yellen ont déclaré que le taux de chômage était un outil de mesure imparfait de l’activité et qu’ils étaient plutôt d’avis que la pénurie de main-d’œuvre s’explique par des raisons cycliques.

Certes, on ne peut nier que des facteurs cycliques soient intervenus dans la baisse du taux de chômage au cours des douze derniers mois.

Facteur décisif clé : l’inflation

Le Royaume-Uni a établi l’inflation au rang des paramètres de ses forward guidances dès le début ; les Etats-Unis ont accentué sa pondération lorsque le taux de chômage s’est rapproché du seuil.

C’est commode dans les deux cas : l’inflation baisse au Royaume-Uni et reste faible aux Etats-Unis. Pourtant, plusieurs études indiquent que le lien entre inflation et chômage est non linéaire, notamment lorsque le taux de chômage est trop élevé.

L’inflation sera donc fondamentale pour démontrer l’efficacité de l’orientation actuelle des politiques monétaires de la Banque d’Angleterre et de la Fed.

Et après ?

Le rôle non linéaire et accommodant des forward guidances reviendra sur le devant de la scène (même temporairement) lorsque des variables économiques importantes repartiront à la baisse. Les marchés sont restés focalisés sur les dynamiques actuelles. Ils continuent d’ignorer la série persistante de données économiques plus faibles que prévu aux Etats-Unis, en partie liée aux conditions climatiques. Cependant, si la mollesse de l’économie se poursuit, la remontée obligataire qui s’ensuivra sera magnifiée par le prisme de ces forward guidances 2.0.

Après la hausse des taux enregistrée l’année dernière, le jeu d’équilibriste des banques centrales est de retour sur fond d’inflation faible. Si les marchés tiennent compte des relèvements des taux et que les banques centrales confirment leur sentiment, les choix ouverts par la forward guidance auront déjà expiré.

Toutefois, étant donné le rôle accru de l’inflation dans cette deuxième version de forward guidance, il semble que la Fed et la Banque d’Angleterre souhaitent conserver cette non-linéarité dans tous les niveaux de marché. Cela sera notamment le cas si, comme en 2010-2011, la reprise en cours devait caler.

Cela dit, si l’inflation commence à grimper, la crédibilité de la Fed et de la Banque d’Angleterre sera remise en question, au regard de l’orientation de la politique monétaire favorable à l’assouplissement durant la période consécutive à la crise.

Salman Ahmed , Mars 2014

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