Forte baisse du coût de la couverture de change : les actifs obligataires en US Dollar retrouvent leur attrait pour les investisseurs non-américains à la recherche de rendement

Au regard de tous les bouleversements survenus sur les marchés financiers ces deux dernières semaines, il serait facile de négliger un facteur qui pourrait pourtant influencer de manière significative les flux d’investissement sur le segment des obligations corporate au niveau international...

Au regard de tous les bouleversements survenus sur les marchés financiers ces deux dernières semaines, il serait facile de négliger un facteur qui pourrait pourtant influencer de manière significative les flux d’investissement sur le segment des obligations corporate au niveau international. Il s’agit de la baisse substantielle du coût de la couverture du dollar des investissements sur le marché du crédit américain.

Et ce sont en particulier les obligations américaines High Yield qui apparaissent beaucoup plus attractives pour les investisseurs britanniques, européens et japonais, ce qui pourrait libérer une grande partie de la demande de rendement actuellement en attente.

Ces quelques dernières années ont été une période frustrante pour les investisseurs non américains à la recherche de rendement. En effet, le marché High Yield européen générait un rendement de 2 à 4 % sur cette période, tandis que le marché américain offrait un rendement de 5 à 7 %. À première vue, il était possible de générer un rendement deux fois plus élevé sur le marché américain.

En réalité, ce rendement était conditionné à une exposition à la devise américaine. Mais les devises peuvent être très volatiles. Une approche d’investissement non couverte est généralement réservée aux plus courageux ou aux imprudents.

La couverture du risque de change consiste à vendre une devise pour en acheter une autre. Si vous êtes un investisseur en euros qui souhaite couvrir son exposition au dollar, vous devez vendre suffisamment de dollars pour couvrir la valeur de votre investissement et acheter une exposition à l’euro avec les bénéfices.

Cela entraîne des coûts qui proviennent notamment du « cross-currency basis », c’est-à-dire essentiellement le supplément payé pour acheter une devise très demandée. Mais la majeure partie des coûts provient de la différence entre le taux d’intérêt à court terme reçu lorsque vous détenez une devise et le taux d’intérêt à court terme payé lorsque vous en vendez une autre.

Ces taux sont indirectement liés aux taux directeurs des banques centrales respectives de chaque devise. La Réserve Fédérale américaine a commencé à augmenter les taux à la fin de 2015 pour atteindre 2,5 % au milieu de l’année dernière. En revanche, la Banque d’Angleterre a augmenté ses taux deux fois depuis 2016, mais n’a atteint que 0,75 %, et a inversé la tendance le 11 mars 2020. La Banque centrale européenne est restée quant à elle en territoire négatif pendant quatre ans.

Si vous vendiez des dollars entre 2015 et 2019, le taux d’intérêt était alors de plus en plus élevé - alors que le taux que vous receviez ne bougeait pas. Pour les investisseurs en euro et en livre sterling qui détiennent des actifs américains couverts en devises, le coût net a culminé à 3,6 % et 2,1 %, respectivement. C’est suffisant pour annuler tout le rendement supplémentaire obtenus en achetant des obligations High Yield américaines plutôt qu’européennes.

Mais ces coûts ont régulièrement diminué pendant les neuf mois qui ont précédé la baisse agressive des taux par la Fed de 50 points de base la semaine dernière. Le coût de la couverture a ensuite continué sa très forte baisse. Le 11 mars, le coût de couverture du dollar était tombé à moins de 1 % pour les investisseurs en euros et à seulement 12 points de base pour les investisseurs en livres sterling.

Dans le même temps, les obligations High Yield américaines ont connu plus de ventes massives pendant la crise du coronavirus que les obligations High Yield européennes, dont les émetteurs sont généralement de meilleure qualité et moins cycliques. En conséquence, en US Dollar, le marché des obligations High Yield offrait encore un rendement supérieur de 2,5 points de pourcentage par rapport au marché High Yield européen.

Même en tenant compte du coût de couverture, vous obtenez maintenant près de deux points de pourcentage de rendement supplémentaire en passant des obligations européennes aux obligations américaines High Yield.

En d’autres termes, un investisseur européen couvrant le risque de change lors de son investissement dans l’indice américain des obligations High Yield obtenait un rendement d’environ 2,4 % avant que le coronavirus ne fasse la Une des journaux et que la Fed ne réduise ses taux. Il obtient maintenant plus de 6 %.

Cette situation est-elle susceptible de s’inverser bientôt ? Nous en doutons. Il est difficile d’imaginer que la Fed augmente ses taux de 50 points de base au cours des prochaines semaines, ou que les taux à court terme déjà minimes associés à l’euro et à la livre sterling soient beaucoup plus bas par rapport aux taux en dollar. En fait, les marchés de taux prévoient que la Fed revienne à zéro. Cela réduirait probablement le coût de couverture en dollar par rapport à l’euro d’environ 0,5 %, tout en effaçant complètement le coût de couverture en dollar par rapport à la livre sterling.

Il est clair que l’environnement est instable et que la volatilité est de retour. La valeur relative des rendements en devise locale peut changer à mesure que les marchés réagissent à la situation du coronavirus. Mais il est aujourd’hui possible de dire que le coût de la couverture du risque de change ne devrait plus constituer un obstacle pour les investisseurs qui cherchent à investir sur le marché obligataire américain.

Nous pensons que les flux vers les actifs américains pourraient augmenter considérablement une fois que la situation sera plus calme et que les investisseurs réévalueront la valeur relative de l’offre sur les obligations des marchés développés.

Alex Gitnik , Vivek Bommi , Mars 2020

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