De l’intérêt d’introduire de la convexité à l’actif d’un assureur vie

Un des risques les plus appréhendés par les assureurs aujourd’hui est la perspective de remontée des taux longs. En effet, l’actif d’un assureur est majoritairement composé d’obligations qui se déprécient avec une remontée des taux...

Or, les perspectives de sortie des politiques monétaires accommodantes aux Etats-Unis et dans une moindre mesure les anticipations de croissance et d’inflation qui se redressent dans les pays appelés « Coeur » de l’Europe sont autant de déterminants d’un risque de remontée des taux obligataires. De fait, le niveau des taux forwards matérialise le fait que ces anticipations sont partagées par les opérateurs de marché.

Cependant, un assureur peut théoriquement s’immuniser contre le risque de taux en alignant la duration de son actif sur celle de son passif, ce qui atténue la pénibilité d’une dépréciation obligataire. En effet, un passif très élémentaire peut se répliquer par une série d’obligations zéro-coupons qui se déprécient concomitamment aux obligations présentes à l’actif lorsque les taux s’apprécient.

Pour autant, la complexité du passif d’un assureur vie inhérente aux options et garanties offertes aux assurés rend l’exercice de couverture du risque de taux plus délicat. En effet, même à duration égale, le passif n’évolue pas comme l’actif. Pour une hausse des taux par exemple, le passif se déprécie moins que l’actif car les assurés détiennent une option de remboursement de leur contrat, ce qui peut être assimilable à une obligation puttable qui donne le droit d’obtenir un remboursement anticipé au pair.

Ainsi, l’option détenue par l’assuré, inhérente au contrat d’assurance vie, induit une plus faible dévalorisation du passif lors d’une hausse de taux : le passif se convexifie. A duration égale, les fonds propres diminuent plus que pour un passif « élémentaire » car l’actif se déprécie plus que le passif vie.

Le mécanisme est similaire dans un cas de baisse des taux : le taux minimal garanti inhérent au contrat d’assurance-vie est assimilable à un put de type floor détenu par l’assuré qui prend de la valeur lorsque les taux baissent. Dès lors, le passif s’apprécie plus que l’actif lorsque les taux baissent ce qui induit un impact négatif sur les fonds propres.

Le graphique ci-dessous, qui représente la valorisation de l’actif et du passif en fonction du niveau de taux d’intérêt, illustre la plus grande convexité d’un passif vie par rapport à un actif obligataire traditionnel. Même si les assureurs essayent de pallier ce problème en réduisant les options et garanties proposées dans les contrats d’assurance (en introduisant des coûts de sortie, en réduisant le niveau de taux garanti ou en poussant les clients retail à investir sur des OPCVM pour leur transférer le risque), l’enjeu pour le gérant d’actifs est d’introduire de la convexité à l’actif en face de son passif vie.

Les moyens pour y parvenir passent par l’achat de produits à effet de levier, autrement dit des options sur taux.

Deux grandes possibilités existent : les swaptions (options sur swap) d’une part qui sont des produits qui offrent de la convexité à la baisse et à la hausse des taux, les caps et floors (options sur taux) d’autre part qui offrent respectivement de la convexité à la hausse et à la baisse des taux.

Toutefois, ces options s’achètent en payant une prime : de fait, l’introduction de convexité a un coût. Ainsi, sur le graphique ci-dessus, la convexification du mark-to-market de l’actif se ferait au prix d’une translation du mark-to-market vers le bas.

Dès lors, l’enjeu principal passe, d’une part, par une analyse fine par l’assureur du degré de convexité au passif et, d’autre part, par un partage de l’information avec l’asset manager qui sera en mesure de déterminer le vecteur et le degré de convexité à introduire à l’actif. Il convient cependant de noter que, pour des raisons de coût, une couverture complète de la convexité n’est pas forcément optimale.

David Zerbib , Juillet 2013

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