Cinq thèmes d’investissement de Robeco pour 2013 !

Que nous réserve 2013 ? Une dégradation possible de la notation crédit des États-Unis, un retour de la crise de la dette en zone euro et une économie chinoise revitalisée, pour commencer. Léon Cornelissen et Ronald Doeswijk, économistes chez Robeco expliquent comment ces développements auront une incidence sur les perspectives des actifs d’investissement.

1. La falaise fiscale américaine

L’année 2012 tirant à sa fin, le plus grand risque pour les États-Unis serait que des politiciens irresponsables laissent l’économie tomber de la falaise fiscale (« fiscal cliff ») au bord de laquelle le pays se trouve. Si le Congrès peut agir d’ici fin 2012, il lui faudra combiner à l’expiration des allégements fiscaux, des hausses d’impôts et des réductions de dépenses. L’impact positif sur l’économie représenterait plus de 600 milliards de dollars.

Ne pas prendre de telles mesures pourrait avoir de graves conséquences : non seulement une hausse du chômage et une baisse des recettes fiscales, mais également le retour en récession de la plus grande économie mondiale au cours de l’année 2013.

Pourtant, nous ne sommes pas trop inquiets car nous pensons qu’un accord sera trouvé avant qu’il ne soit trop tard. Certains compromis seront faits. Il suffit de ne pas trop attendre.

Nous estimons qu’une fois la falaise fiscale court-circuitée, le gouvernement américain va essayer de réduire le déficit de 1 point de pourcentage, ce qui le ramènera à moins de 6%. L’assainissement budgétaire ne peut pas être repoussé indéfiniment.

Une dégradation de la note des Etats-Unis peut être sérieusement envisagée en 2013.
Léon Cornelissen

Essayer, c’est faire se succéder une chose à une autre. Compte tenu de l’impasse politique, il reste à voir si le déficit sera effectivement réduit l’an prochain par rapport au niveau actuel. Par ailleurs, le ratio d’endettement des Etats-Unis va augmenter au-dessus de 110% du PIB en 2014.

Même si le déficit budgétaire est nettement réduit, il sera toujours trop élevé. Ce point est important car ne pas l’aborder correctement pourrait inciter les agences de notation à dégrader la note de crédit américaine. S&P a retiré aux Etats-Unis son triple A l’été 2011, alors que Moody’s et Fitch continuent de les positionner dans le haut de leurs classements. Nous pensons cependant qu’une baisse de la notation des trois agences est une sérieuse possibilité en 2013.

Le Congrès peut-il se ressaisir ?

Comment éviter cette révision à la baisse ? Il faudrait que le Congrès prenne de sérieuses décisions à moyen terme. Mais nous ne pensons pas que cela se fera. Avec un Congrès divisé, un président pragmatique et désintéressé et compte tenu particulièrement du pacifisme de la Réserve Fédérale, la mise en place d’un programme pluriannuel visant à ramener le déficit à 3% ou 4% du PIB est peu probable.

L’intransigeance partisane mise de côté, une des raisons de cette approche « détendue » est peut-être le souvenir de ce qui s’est passé lorsque le S&P a dégradé les Etats-Unis d’un cran, en août 2011. Même si le pays était ainsi considéré comme plus risqué, les bons du Trésor américain ont connu un rallye grâce aux investisseurs cherchant des valeurs refuges.

Ainsi nous ne pensons pas qu’une dégradation serait un choc particulier pour les investisseurs. Cela pourrait cependant attirer l’attention sur le fait qu’en moyenne l’Europe est plus encline que les Etats-Unis et le Japon à faire des efforts pour réduire sa dette.

L’Europe fait de son mieux pour réduire sa dette

Ce point a été soulevé par le président de la BCE, Mario Draghi, après la réunion du conseil de la banque centrale de novembre. Il a déclaré que la zone euro dans son ensemble et les pays pris individuellement ont une position fondamentale qui est beaucoup plus équilibrée que celle des Etats-Unis. La zone de la monnaie unique bénéficie d’un niveau d’endettement des entreprises et des ménages relativement faible, de la baisse des coûts salariaux unitaires et d’une "incroyable" consolidation fiscale à travers la région.

Pourtant, l’histoire de la falaise fiscale se joue dans le contexte d’une économie américaine en phase de reprise progressive. Le marché du logement comme celui du travail sont en constante amélioration. Par ailleurs, la Fed a réaffirmé sa détermination à ne pas suivre la cadence. Elle maintiendra donc sa politique monétaire agressive sur toute l’année 2013.

En fait, nous estimons qu’une fois la falaise fiscale écartée, l’économie américaine va surprendre à la hausse. Les prévisions de croissance du consensus pour 2013 augmentent progressivement à 3%, contre 2% pour l’ensemble de cette année. De plus, l’inflation ne sera pas un problème.

Conséquences sur les investissements : l’économie américaine est relativement robuste malgré la dynamique de la dette du pays. Cette force macro-économique donne les meilleures chances aux actions.

2. Pas de fin en vue pour la crise de la zone euro

La zone euro n’est plus en ébullition depuis que la BCE a annoncé sa nouvelle politique d’achat illimitée d’obligations du marché secondaires. Mais elle n’a pas disparu. La région restera en crise en 2013 et cela pourrait facilement dégénérer.

Aucune fin n’est en vue. D’une part, les progrès vers un système fiscal entièrement intégré et une union politique et bancaire seront probablement lents, ce qui est décevant. Des doutes quant à la faisabilité à long terme du projet euro resteront d’actualité et pourront être exacerbés par la sortie de la Grèce de la monnaie commune.

La Grèce est le principal souci à court terme

C’est la Grèce que nous identifions comme le principal problème à court terme. L’incertitude sur le paiement d’une nouvelle aide au pays, pour un montant de 31,5 milliards d’euros, n’est pas résolue et la détérioration de l’économie du pays s’intensifie. Au troisième trimestre, le PIB réel a diminué de 7,2% en glissement annuel. Le taux de chômage a grimpé à 25,4% en août, contre 18,4% un an plus tôt. Le taux de chômage des jeunes a atteint le niveau impressionnant de 58%.

Nous avons toujours l’impression que la volonté politique pour maintenir la Grèce dans la zone euro reste au plus haut niveau. Le financement sera difficile, mais où il y a de la volonté, il existe des moyens. Une sortie grecque de l’euro est donc plus susceptible d’être invitée par des pressions intérieures. En fin de compte, un « Grexit » n’est pas un risque aigu, mais la probabilité que la Grèce quitte la zone euro sur un horizon de 12 mois est de 50/50.

La zone euro restera en crise en 2013.
Léon Cornelissen

Mais la Grèce n’est pas le seul souci. L’Espagne est la suivante sur la liste. Il est difficile de voir comment elle pourra éviter d’entrer dans le filet de sécurité. Cela représenterait un premier test important pour l’OMT, que la BCE n’a pas encore utilisé. Le Portugal reste aussi une source d’inquiétude. D’autres incertitudes proviendront des élections en 2013 en Italie et en Allemagne. Dans ce dernier pays, la passivité politique est susceptible d’augmenter en raison des élections.

Ensuite, il y a la France, dont l’affaiblissement de la compétitivité par rapport à l’Allemagne est une évolution inquiétante au coeur de la zone euro. Jusqu’à présent, le nouveau président, François Hollande, a peu agi pour faire face à long terme aux problèmes économiques du pays. Selon nous, la pression sur François Hollande est énorme, mais sa volonté de résoudre le problème n’est pas très grande. Mi-novembre, le gouvernement s’est jeté sur quelques données meilleures que prévues : le PIB a augmenté de 0,2% au troisième trimestre, alors que les attentes de croissance étaient nulles voire négatives. Il a ainsi pu rejeter l’idée que le pays est l’homme malade de l’Europe. Mais son déficit budgétaire est de 4,5%. La dette publique se monte à 91% de la production économique. Son compte courant sera déficitaire sur les sept prochaines années.

L’économie la zone euro devrait se contracter en 2013

Même si la France a réussi à gagner une minuscule part de croissance au troisième trimestre, la zone euro est retombée en récession au troisième trimestre, pour la première fois en trois ans, car la faiblesse de la périphérie a continué d’infecter son coeur. Même l’Allemagne, qui a tout juste réussi à se maintenir en positif (la croissance du PIB s’est établie à 0,2%) semble se contracter au quatrième trimestre.

Toutes les conditions sont donc réunies pour une performance peu impressionnante en 2013. La zone euro vivra un recul de son économie.

En dépit de cette détérioration de l’environnement, la BCE n’est susceptible d’apporter que des modifications marginales de sa politique. Le taux officiel est ainsi appelé à se réduire, passant de 0,75% à 0,5%, le taux de dépôt restant inchangé. Compte tenu de la faiblesse des perspectives, cette baisse pourrait avoir lieu en décembre 2012. Elle pourrait cependant être retardée jusqu’en 2013 car l’inflation est encore relativement élevée. Elle devrait passer sous le seuil de 2% en 2013.

Pas de changements spectaculaires attendus de la part de la BCE

Aucune mesure plus radicale de la BCE ne devrait être attendue en 2013. Il est vrai que la banque centrale se livrera à un assouplissement quantitatif supplémentaire lorsque l’Espagne cèdera et demandera enfin de l’aide. Elle pourrait être rejointe plus tard par l’Italie. Mais la BCE n’ira probablement pas plus loin l’année prochaine. Sa préférence pour les taux d’intérêt positifs suggère que le taux de refinancement ne devrait pas descendre en dessous de 0,5%.

Cela étant dit, la BCE pourrait envisager un assouplissement quantitatif général et/ou des taux négatifs à un stade très ultérieur dans le cas où une grave déflation s’installerait dans la zone euro, ce qui est très peu probable en 2013.

Conséquences en termes d’investissement : La zone euro va probablement tenir bon, mais l’austérité aura un effet négatif sur la croissance, et la faiblesse économique entraîne un risque que l’euro soit à nouveau sous pression. Cela ralentit le potentiel des actions européennes.

3. La reprise cyclique en Chine s’accélère

2013 devrait voir l’économie chinoise se revitaliser. Depuis le début de l’année 2012, elle se développe au rythme le plus lent enregistré depuis 1999. Le taux de croissance trimestriel du pays, en année glissante, a chuté de 12% depuis début 2010 à environ 7,5% à l’heure actuelle.

Heureusement, des données positives commencent à apparaître. En octobre, le secteur manufacturier a progressé pour la première fois en trois mois, tandis que les ventes au détail ont augmenté à un plus fort niveau depuis six mois. La Chine montre déjà des signes de reprise, en conséquence du premier modeste relâchement politique. L’économie va encore se renforcer l’an prochain.

Ne pas trop attendre des nouveaux dirigeants chinois

Quelle part de cette reprise pourra être attribuée aux nouveaux dirigeants du pays, présentés mi-novembre ? Selon nous, ils ne vont pas permettre à l’économie de trop se détériorer mais ce serait une erreur de trop attendre d’eux.

L’économie chinoise se renforcera l’année prochaine.
Léon Cornelissen

Après tout, ces nouveaux dirigeants ont une inclinaison conservatrice. Li Keqiang, le nouveau premier ministre, connaît son économie, mais nous pouvons aussi le décrire comme un « bureaucrate prudent ». Aucun changement politique majeur n’est donc à prévoir et aucune réforme sérieuse n’est susceptible d’être introduite pour répondre aux déséquilibres de l’économie qui se sont accumulés au cours de la dernière décennie. Ces problèmes sont notamment la surcapacité dans des secteurs tels que l’acier et le ciment, la baisse des bénéfices des entreprises, l’effet de levier accru dans l’économie et l’offre de crédit aux PME systématiquement faible.

Conséquences sur les investissements : les marchés émergents ont enregistré des rendements décevants et récemment les révisions des bénéfices ont été faibles. Mais l’accélération de la croissance économique de la Chine devrait aider à stimuler le sentiment, tandis que les marchés émergents sont sous-évalués de 10% à 15% par rapport aux marchés développés.

4. Peu de possibilité de croissance des bénéfices

Il se peut que les bénéfices du troisième trimestre 2012 aient atteint un plafond. Oui, les chiffres des recettes sont généralement décevants. Mais les bénéfices étaient, dans la plupart des cas, supérieurs aux attentes. Ces bons résultats peuvent être attribués à des marges élevées résultant de la réticence des entreprises à investir, aux faibles coûts d’emprunt et au niveau élevé du chômage qui maintient le coût du travail bas.

Cette saison des bénéfices nous a réellement montré la nature prudente des entreprises face à l’avenir. Ce n’était pas une surprise pour nous, car nous croyons qu’il n’existe pas de potentiel de hausse des marges bénéficiaires. Au contraire, nous nous attendons à ce que, au mieux, elles se stabilisent.

Les marges des entreprises n’ont pas de potentiel de hausse.
Ronald Doeswijk

Mais les perspectives des analystes pour l’année prochaine contiennent toujours une part de voeu pieu. Le consensus pense que les marges peuvent encore s’accroître en 2013. De notre côté, nous estimons que cela sera difficile et que les attentes sont trop optimistes.

Un soupçon de rêve est également présent dans les prévisions sur les bénéfices. Pour 2013, les analystes s’attendent à une croissance de 12%. Mais les marges statiques limiteront ce potentiel. Nous nous attendons à ce que la croissance des bénéfices ne soit qu’à un chiffre et faible, au lieu des deux chiffres espérés.

En bref, une nouvelle manche de 2012 se jouera probablement en 2013. L’année prochaine verra une série de fortes dégradations similaires à celles qui ont eu lieu cette année. Fin 2011, les analystes s’attendaient à une croissance des bénéfices mondiaux de 12% en 2012, ils tablent maintenant sur une croissance de 4% sur l’année.

Conséquences sur les investissements : la saison des résultats du troisième trimestre a confirmé que la croissance des bénéfices ne devrait pas piloter les cours des actions en 2013. En cela, les perspectives des actions sont ternes.

5. Les crédits investment grade, le high yield et la dette émergente ont de meilleures perspectives en 2013, année marquée par de faibles rendements

Comme nous l’avons vu, les perspectives pour les actions sont mises en sourdine. Qu’en est-il des obligations d’État de haute qualité ? Les rendements sont proches des niveaux historiquement bas, et alors que les ventes massives sont improbables - les taux d’intérêt à long terme étants susceptibles de rester faibles dans l’environnement actuel de faible croissance/faible inflation, et compte tenu de la pénurie structurelle de papiers de haute qualité - aucun gain important ne peut être raisonnablement attendu.

Et l’immobilier ? Les perspectives de la classe d’actifs, même avec ses caractéristiques défensives supérieures, ne valent pas mieux que les actions. Les matières premières ? Dans une autre année de croissance économique mondiale modérée, les prix des matières premières sont les plus susceptibles de dériver latéralement.

Les meilleures perspectives pour 2013 se sont exprimées sur les crédits investment grade, les obligations à hauts rendements et la dette émergente.

Vous êtes trop optimistes si vous pensez obtenir des rendements très élevés l'année prochaine.
Ronald Doeswijk

Que faire ? La confusion macroéconomique est un environnement propice aux crédits de grande qualité et aux obligations à rendements élevés, même après leur reprise de ces derniers mois. Cela étant dit, nous ne nous attendons pas à tirer beaucoup plus du resserrement des spreads. Au contraire, nous pensons que les spreads sont en eux-mêmes suffisants pour nous conforter dans notre point de vue positif. Les rendements des obligations gouvernementales sont négatifs en termes réels. Dans un même temps, les fondamentaux des entreprises sont solides, elles continuent à se comporter avec prudence et ont des soldes de trésorerie élevés.

La dette émergente est également intéressante. Nous croyons que les moteurs de rendement actuels, principalement la quête de rendement et les fondamentaux économiques sains de ces marchés, restent solidement ancrés. En effet, le rendement de 5,7% de la dette des marchés émergents est bien supérieur à celui des emprunts d’Etat de haute qualité.

Nous évaluons ces trois types d’obligations les plus risquées comme étant à niveau égal.

Sourdine probable sur les rendements en 2013

Il y existe encore de bonnes opportunités. Mais, il y a un « mais ». Vous êtes trop optimistes si vous pensez obtenir des rendements très élevés l’année prochaine. Les 10 points de pourcentage de performance supplémentaire par rapport aux obligations gouvernementales de haute qualité sur lesquels l’année devrait se conclure ne se répéteront pas en 2013.

Nous pensons que le high yield pourrait générer 4 points de pourcentage supplémentaires par rapport au rendement sans risque, tandis que les marchés émergents sont susceptibles d’enregistrer 4 autres points de pourcentage. Cela pourrait être pire...

Conséquences sur les investissements : dans l’environnement de faibles rendements de 2013, des rendements élevés sur les crédits investment grade, le high yield et les marchés émergents devraient se révéler intéressants. Aucune vente massive d’obligations gouvernementales de haute qualité n’est prévue et leurs perspectives sont pour le moins modestes.

Léon Cornelissen , Ronald Doeswijk , Décembre 2012

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