Actions japonaises : Rebond économique, rachats d’actions

Le marché japonais a retrouvé des couleurs depuis maintenant deux semaines. Les effets négatifs de la hausse de la TVA se dissipent progressivement, les entreprises rachètent leurs actions et les dernières annonces de réformes sont prometteuses...

Amorce de rebond après un trimestre décevant

Au cours du premier trimestre, le marché japonais a largement sous- performé les marchés mondiaux, pour deux raisons principales :

  • l’approche de la hausse de la TVA de 3% au 1er avril,
  • la déception de certains investisseurs, qui pensaient que la Banque du Japon prendrait des mesures supplémentaires

Mais le marché est en train de se reprendre : depuis le 20 mai, la performance du MSCI Japon se situe à 9,25%, alors que celle du MSCI Europe par exemple est de 1,72% [1].

Nous estimons que ce rallye devrait perdurer :

  • les facteurs ayant pesé au cours du premier trimestre se dissipent ;
  • l’économie va digérer la hausse de la TVA et reprendra rapidement le chemin de la reflation ;
  • les entreprises rachètent massivement leurs actions ;
  • la baisse des taxes des entreprises pourrait s’avérer plus rapide que prévu initialement.

TVA : déjà quelques signes de rebond

Les investisseurs s’inquiètent des effets de la hausse de la TVA du 1er avril, effectivement largement supérieure à l’augmentation des salaires.

Le souvenir de 1997, où l’économie avait eu du mal à se remettre d’une hausse, a renforcé ce sentiment.

Les premières statistiques, très instables, n’ont pas rassuré les marchés : en anticipation de la hausse du 1er avril, les ventes de mars de biens durables ont explosé ; puis elles ont baissé en avril en raison à la fois du rattrapage du mois de mars et du renchérissement des biens.

Mais l’impact de la hausse de la TVA devrait se révéler moins important que ce que l’histoire suggère : en 1997, le pays était en effet en pleine déflation, alors qu’en 2014, il a déjà entamé sa reflation.

Il est certes encore trop tôt pour apporter une conclusion à ce débat, mais les premiers chiffres semblent confirmer nos anticipations :

  • Les ventes de détail ont largement rebondi en mai.
  • L’enquête Tankan Reuters manufacturière a progressé entre mars et juin.

Le débat n’est pas clos, mais les partisans de la reflation, dont nous faisons partie, ont marqué quelques points.

La BoJ favorable à une politique de « grands pas »

Messieurs Kuroda et Iwata ont été clairs dans leur communication : ils n’appliqueront pas de politique des petits pas.

A moins que l’économie ne tourne franchement mal, ce qui n’est pas ce que nous anticipons, la Banque du Japon devrait conserver une politique monétaire inchangée.

Les investisseurs de moins en moins nombreux qui anticipent une action supplémentaire en cours d’année risquent donc d’être encore déçus.

Toutefois, ceci ne devrait pas impacter matériellement le marché : les niveaux de valorisation actuels indiquent en effet que cette déception a été largement prise en compte.

N’oublions pas en revanche que la BoJ continue d’injecter massivement des liquidités, dans des proportions très supérieures à la BCE, la Fed ou la BoE.

Beaucoup plus important, le Japon sort de la déflation, les flux domestiques soutiendront le marché et, fait nouveau, la troisième flèche de Shinzo Abe pourrait réserver au bout du compte de bonnes surprises.

Avec ou sans Abe, la reflation est en route

Afin de rééquilibrer des bilans largement altérés par l’éclatement de la bulle de l’immobilier et du marché des actions, les ménages et les entreprises japonais ont entrepris de réduire massivement leur dette, entraînant ainsi le pays dans la déflation.

L’accroissement des volumes de crédit accordés à l’économie depuis 2010 et le réveil du marché des fusions et acquisitions montre que le rééquilibrage des bilans est achevé : les acteurs économiques japonais ont retrouvé leur dynamisme.

Flux domestiques : les rachats d’actions devancent les NISA et le GPIF

Les entreprises commencent à acheter leurs titres : 152 sociétés du Topix ont annoncé un record absolu de 25 milliards de dollars US de rachats d’actions depuis le début de l’année [2].

Pour un dirigeant, le rachat d’action est effectivement irrésistible : les bilans affichent des liquidités record, les actions sont bon marché, l’inflation accélère et le gouvernement pousse à l’augmentation du retour sur capital.

Les investisseurs japonais investissent généralement peu dans des actions. Les ménages, par exemple, ont une proportion d’actions dans leurs portefeuilles de 9% [3], presque deux fois inférieure à celle des Européens, et quatre fois inférieure à celle des Américains.

Mais le gouvernement Abe a entrepris de changer cela : modification des allocations cible du plus grand fonds de pension, le GPIF, et mise en place d’un plan d’épargne actions défiscalisé, le NISA.

Ces efforts devraient être couronnés de succès car l’inflation redevient positive et le cash offre désormais un taux réel négatif.

Troisième flèche : accent mis sur la performance du capital

Le gouvernement est décidé à augmenter le retour sur capital des entreprises japonaises, actuellement un des plus faibles parmi les marchés développés.

Dans ce cadre, les dernières annonces du gouvernement indiquent une baisse plus rapide que prévu des taxes des entreprises.

Les anticipations de baisse des taxes s’étaient calées sur les dates de hausse de la TVA : baisse des taxes sur les entreprises au 1er avril 2014 et probable baisse en octobre 2015, date probable de la prochaine hausse de la TVA.

La volonté affichée d’arriver rapidement à un niveau de taxation proche de celui de l’Allemagne laisse penser que la prochaine réduction se situera 6 mois plus tôt que prévu, en avril 2015.

Ceci confirme les analyses selon lesquelles les taxes seraient réduites de 2% par an, jusqu’à arriver au niveau de 22-25%, fourchette appliquée dans les pays d’Asie du Sud-Est.

Le ministère des Finances et le parti libéral-démocrate, le LDP, jusque-là réticents à ce projet, ont probablement été convaincus par ces trois arguments :

  • l’effet positif d’une baisse des taxes sur l’économie,
  • le retour potentiel des capitaux japonais investis en Asie du Sud-Est et l’arrivée d’investissements étrangers,
  • la révision probable de la taxation des petites entreprises, qui bénéficient aujourd’hui de larges exemptions et qui pourraient compenser une partie du manque à gagner pour l’Etat.

Frédéric Rollin , Juillet 2014

Notes

[1] 1 Source : Pictet, performances en monnaie locale, du 20 mai 2014 au 27 juin 2014

[2] Source : Bloomberg

[3] Source : Banque du Japon, juin 2014

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