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Juridique et Fiscalité

Exclusion d’une SAS : l’associé concerné doit voter !

Deux arrêts de la Cour de cassation [1] , prononcés cet été, ont rappelé la règle générale selon laquelle tout associé en voie d’exclusion a le droit de participer aux décisions collectives et donc de voter.

Ces deux arrêts mettent une nouvelle fois en évidence la situation paradoxale de la SAS, qui hésite sans cesse entre le contrat et donc la liberté, d’une part, et l’institution d’autre part.

La liberté est exprimée par différents articles du Code de Commerce.

–* Concernant la direction de la société, l’article L.227-5 prévoit que « Les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ».

–* Et concernant l’exclusion, l’article L.227-16 prévoit simplement que « Dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions ».

Fort d’un sentiment de quasi impunité, la pratique s’était développée vers la rédaction de clauses d’exclusion qui prévoyaient l’absence de participation au vote de l’intéressé.

Un arrêt du 23 octobre 2007 [2] a mis bon ordre dans ce qui apparaissait comme un coup de canif au contrat social, et redonnait au passage sa place à l’affectio societatis sous le visa de l’article 1844 du Code Civil qui dispose que « Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ».

Les deux arrêts du 9 juillet 2013 apportent une nouvelle pierre à la conception institutionnelle de la SAS au terme d’un raisonnement qui ne peut qu’être approuvé.

Dans le premier arrêt, la clause d’exclusion statutaire prévoyait que l’associé visé par cette sanction ne participerait pas au vote. L’assemblée, consciente du risque d’annulation encouru a donc offert à l’associé en cours d’exclusion de participer néanmoins au vote, ce que celui-ci a refusé en relevant justement que la proposition était contraire aux dispositions statutaires. La Cour de Cassation retenait à juste titre qu’il « n’entrait pas dans les pouvoirs de la société/du président de modifier à sa guise les dispositions statutaires querellées, une telle modification nécessitant l’accord unanime des associés, conformément à l’article L.227-19 du Code de Commerce ».

Dans la seconde affaire, qui concernait les mêmes parties, la société et son président faisaient valoir qu’en bonne logique, le Juge devait pouvoir rectifier la clause litigieuse pour lui donner le sens voulu par les parties et donc supprimer purement et simplement la partie relative à la privation du droit de vote de l’associé menacé d’exclusion.

Pour être complet, il faut préciser que la société avait tenté de régulariser les statuts en votant, à l’occasion d’une autre assemblée générale, une modification de la clause d’exclusion afin de supprimer la privation du droit de vote de l’associé concerné. Cette résolution n’avait hélas, mais bien entendu, pas recueilli l’unanimité nécessaire.

La réponse de la Cour de Cassation est identique ; seule une décision unanime des associés de la SAS permet de modifier une clause d’exclusion.

Il faut donc retenir de l’ensemble de ces décisions que toute procédure d’exclusion d’un associé d’une SAS soumise à l’assemblée générale implique un respect parfait du contradictoire et du droit de vote dont dispose chaque associé ; cela signifie que l’associé dont l’exclusion est envisagée, doit pouvoir s’expliquer, être en mesure de se défendre et de participer au vote que la collectivité envisage de prendre à son encontre.

Il importe également de souligner que le droit de vote peut être double, triple, voire plus encore ; il ne peut être dénié, quelle que soit sa faiblesse dans la prise de décision finale. L’application du rapport de force majoritaire/minoritaire doit l’emporter dans le respect de l’esprit démocratique nécessaire au bon fonctionnement de toute société. Il ne faut pas cependant en tirer comme conclusion que la liberté contractuelle est mise à mal dans la SAS. Il serait notamment parfaitement régulier de laisser à un autre organe que l’assemblée générale le soin de se prononcer sur les questions d’exclusion… à charge pour l’organe considéré de garantir le respect des droits de la défense.

En principe, les difficultés révélées par les deux arrêts du 9 juillet 2013 devraient se limiter à des clauses statutaires antérieures à l’arrêt du 23 octobre 2007. Quoiqu’il en soit, il convient d’être extrêmement vigilent sur l’approche de ces clauses, faute de quoi la société risque de jouer, à son insu, le rôle de « l’arroseur arrosé ».

Nicolas Sidier , Octobre 2013

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