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Le yuan bientôt une monnaie de réserve ?

Malgré la baisse de 3,3% du yuan contre le dollar jusqu’ici cette année, les données économiques augurent de son prochain redressement. Pourrait-il alors menacer le statut de principale monnaie de réserve mondiale du dollar ?

L’idée que le yuan puisse un jour menacer le statut du dollar de principale monnaie de réserve mondiale n’est pas précisément nouvelle. Alliée au gonflement de la dette publique américaine, l’émergence de la Chine comme première puissance commerciale au monde ne fait qu’accroître les supputations à cet égard. Cependant, les récentes performances de l’économie chinoise et de sa monnaie tempèrent aujourd’hui ces anticipations : face au ralentissement de la croissance économique et à l’augmentation de l’endettement de la Chine, le yuan a chuté de 3,3% contre le dollar depuis le début de l’année en cours. Toutefois, les données économiques suggèrent que le yuan, aussi appelé renminbi, pourrait amorcer un virage et s’apprécier au cours des prochains mois, auquel cas le débat sur son statut reviendrait au premier plan.

L’action de la banque centrale contribue à la dépréciation

Si la dépréciation du yuan tient au moins en partie aux craintes qu’inspire la croissance économique, elle semble également résulter de l’intervention directe des autorités monétaires chinoises.

La Banque populaire de Chine s’est évertuée à affaiblir le yuan pour dissuader la spéculation à court terme de la part d’investisseurs misant sur la poursuite de son ascension, d’après le Credit Suisse.

« La baisse du yuan a été orchestrée par la banque centrale pour mettre fin au pari unidirectionnel sur son appréciation, indique Dong Tao, économiste au Credit Suisse spécialiste de la Chine. Elle a d’ailleurs réussi à donner une belle leçon aux spéculateurs ».

Les responsables américains pointent des raisons supplémentaires et laissent entendre que la Chine s’efforce d’affaiblir sa monnaie afin de doper les exportations. Dans un rapport au Congrès daté du 15 avril dernier, le département du Trésor américain exhortait la Chine à tenir sa promesse de laisser le yuan fluctuer selon les lois du marché. « La récente évolution du taux de change du renminbi pourrait soulever de sérieuses inquiétudes si elle devait présager d’une résistance renouvelée à l’appréciation de la monnaie et d’un abandon de la volonté affichée de la Chine de réduire les interventions et de permettre au taux de change d’évoluer selon le marché », affirmait ce rapport.

Les chiffres positifs du commerce et du compte courant confortent notre opinion favorable sur le yuan

Ces inquiétudes pourraient toutefois être infondées.

Selon le Credit Suisse, il est peu probable que Pékin laisse la baisse du yuan se poursuivre car la Chine ne peut se permettre de subir la fuite de capitaux qui pourrait résulter d’une dépréciation excessive.

La bonne tenue des chiffres sur le commerce et le compte courant augure également d’un renversement de tendance. L’ampleur inattendue de la baisse des importations et des exportations chinoises en mars a engendré un excédent commercial de 7,7 milliards de dollars, niveau le plus élevé pour un mois de mars depuis 2009. En outre, l’excédent de la balance courante, qui inclut les chiffres du commerce auxquels s’ajoutent les transferts de caisse, a atteint au total 7,2 milliards de dollars au premier trimestre. « Le maintien de l’excédent commercial et de la balance des paiement de la Chine à un niveau élevé est la principale raison de notre opinion positive vis-à-vis du yuan », les analystes du Credit Suisse Ray Farris et Trang Thuy Le écrivaient dernièrement dans un rapport.

Les investisseurs se sont étonnés à juste titre du taux de croissance de 7,4% enregistré par la Chine au premier trimestre, lequel marque le rythme le plus lent depuis un an et demi. Les autorités chinoises ont toutefois annoncé des mesures de relance modérées en avril, y compris des réductions d’impôts et des investissements dans des projets de logements sociaux et de chemin de fer. Plus récemment encore, elles ont annoncé le lancement prochain de plusieurs grands projets dans le domaine de l’énergie, notamment la construction de barrages hydroélectriques et de centrales nucléaires. Le résultat probable de ces décisions est que les chiffres décevants concernant la croissance au premier trimestre marqueront le point le plus bas de cette année, estime le Credit Suisse. « Le gouvernement chinois a commencé à agir pour stabiliser la croissance, indiquaient Ray Farris et Trang Thuy Le. Ces mesures devraient contribuer à l’amélioration du moral et à la réduction du risque politique à l’horizon des prochains mois ».

Des motifs d’optimisme à moyen terme

Certes, une nouvelle détérioration des exportations et de la croissance au cours des semaines à venir n’est pas exclue, auquel cas la banque centrale pourra difficilement laisser le yuan s’apprécier immédiatement. Quand bien même, soutient le Credit Suisse, les autorités chinoises finiront par permettre un rebond, donnant aux investisseurs des motifs d’optimisme quant à l’évolution du yuan à moyen terme.

Le Credit Suisse table sur un taux de change à 6,10 yuans pour un dollar d’ici trois mois, et à 6,07 à un horizon de douze mois.

Le débat sur le statut de monnaie de réserve du yuan reprendrait alors de plus belle.

Jens Erik Gould , Mai 2014

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