L’Espagne, dernier chapitre de la crise de la zone euro ?

La séquence de la crise de la zone euro a-t-elle ouvert son dernier chapitre avec l’Espagne ? Pour que cela soit le cas, encore faut-il que les dirigeants européens et la BCE soient à prêts à agir plus vite et plus fort qu’ils ne l’ont fait jusqu’ici.

Depuis le mois de mars, les marchés financiers sont entrés dans une nouvelle phase de turbulences fortes, avec deux sources d’inquiétude : la Grèce ou l’opinion publique a rejeté dans les urnes la cure d’austérité ; et l’Espagne où le gouvernement Rajoy est confronté à une crise bancaire qui couvait en fait depuis plusieurs années. Si l’avenir de la Grèce au sein de la zone euro est une source légitime d’inquiétude, la situation de l’Espagne est sans doute plus alarmante.

Le rendement à 10 ans des obligations souveraines espagnoles est revenu dans la zone dangereuse des 7%. Or l’histoire de la crise de la zone euro montre que c’est à partir de ce niveau qu’un Etat est contraint d’appeler à l’aide ses partenaires européens et les institutions internationales (FMI notamment). Dans les circonstances actuelles, l’histoire récente nous enseigne également que jouer la montre peut s’avérer particulièrement dangereux.

D’autant que l’aide de l’Espagne engagerait des montants particulièrement significatifs, estimés entre 300 et 400 milliards d’euros. Pour éviter de revivre la crise de l’été 2011, qui avait reconduit la zone euro en récession, la BCE sera contrainte d’intervenir plus vite et en mobilisant simultanément tout son arsenal – du plus conventionnel (baisse des taux directeurs) au moins conventionnel (rachats d’obligations souveraines et injections massives de liquidités dans le système bancaire). L’Europe pourra également mobiliser le Mécanisme Européen de Stabilité pour aider à recapitaliser les banques. L’enjeu est bien d’éviter tout risque de contagion, quel que soit le déclencheur de celle-ci.

Il faut en tout cas éviter à tout prix le pire des scénarios, avec un sommet courant juillet qui n’apporterait aucune solution pérenne ou serait mal interprété par les marchés, et qui ouvrirait le champ à une envolée de la volatilité, voire à une nouvelle crise de financement (nouvelle fermeture du marché interbancaire par exemple). Lorsque le marché du crédit se ferme, le gouvernement n’a plus d’alternative autre que de se tourner vers le prêteur en dernier ressort qu’est la Banque centrale européenne. Au regard des montants engagés pour sauver le soldat espagnol, ce serait un véritable test (le dernier ?) pour l’Union européenne. Celle-ci sera sans doute obligée de réfléchir à une évolution du mandat de la BCE pour lui confier un double mandat clair (stabilité financière et croissance).

Mais quand le feu est déjà dans la maison, le plus important est d’abord d’éteindre l’incendie avant d’envisage de rebâtir l’édifice de la maison Europe. Sur les marchés financiers, la zone euro est devenue une zone d’investissement « non grata », ce qui est à la fois dommage et irrationnel puisque de nombreuses entreprises se traitent aujourd’hui sous la valeur de leurs fonds propres. Les investisseurs sont focalisés sur la protection de leur capital, ce qui pousse les rendements des valeurs refuge (Bund), mais entraîne aussi une plus grande mobilité des capitaux. La crise de la zone euro n’a pas encore atteint son paroxysme.

D’un point de vue boursier, il y a aujourd’hui un terreau favorable à un rebond. Mais celui-ci sera surtout d’ordre technique, car sur le fond rien n’est réglé.

Fabrice Cousté , Juin 2012

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