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Opinion
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C’est presque en fanfare que les marchés obligataires entament cette année 2023, après l’annus horribilis 2022 que tous les investisseurs étaient si heureux de laisser derrière eux… Des taux souverains qui se resserrent violemment, un marché primaire pléthorique, des entrées importantes sur la classe d’actifs…
C’est presque en fanfare que les marchés obligataires entament cette année 2023, après l’annus horribilis 2022 que tous les investisseurs étaient si heureux de laisser derrière eux… Des taux souverains qui se resserrent violemment, un marché primaire pléthorique, des entrées importantes sur la classe d’actifs… Si l’année 2023 sera effectivement sans doute celle d’un retour des obligations dans de nombreux portefeuilles, est-il urgent de se précipiter comme le semble le faire le marché ? Cette chute des taux n’est-elle pas un trompe-l’œil ? Quels écueils et quels risques sera-t-il important de prendre en considération dans son allocation ?
Nous tenterons dans ce premier hebdo de l’année de dessiner les grandes lignes du marché et de notre allocation obligataire pour ce début d’année.
1- Des taux souverains en trompe-l’œil pour cette première semaine
Avant de passer à une vision un peu plus long terme, rassurons ici les investisseurs qui n’auraient pas encore investi et qui auraient l’impression qu’ils auraient manqué le train… A lire les actualités ou observer les graphiques depuis quelques jours, on pourrait en effet avoir l’impression que le marché des taux serait extrêmement volontaire et que la récession ou une politique accommodante de la BCE serait au coin de la rue. Il n’en est rien, pour le moment en tous cas. Le mouvement très haussier sur les obligations d’Etat n’est, pour l’heure, que le pendant du « sell-off » de fin d’année sur les mêmes obligations, « sell-off » lié à l’illiquidité et à des prises de positions short sur les futures mais qui ne s’était pas du tout propagé aux autres obligations du marché. Ainsi sur le seul mois de décembre, les indices souverains réalisaient une performance de -5%...
Dans le même temps les obligations corporates n’avaient que peu évolué, le marché du « real money », c’est-à-dire les investisseurs plaçant vraiment leur trésorerie et non les investisseurs spéculatifs agissant la plupart du temps en dérivés, n’ayant aucune vélléité de céder des obligations, bien au contraire. Ainsi sur la période, les obligations d’entreprises ne perdaient que 2% et les obligations high yield 0.7%.
C’est donc un mouvement à peu près opposé que l’on observe en ce début d’année mais qui n’est, pour le moment, que pure volatilité et qu’il ne faut guère prendre pour une tendance durable, bien que les observateurs et autres chroniqueurs se sentent obligés d’y trouver une explication rationnelle, chiffres d’inflation ou morceau de phrase d’un membre quelconque de banque centrale à l’appui.
2- Quelques grandes lignes pour l’année 2023
Si les obligations et leur rémunération retrouvée semblent un actif à privilégier pour cette année 2023, c’est aussi parce qu’elles représentent pour les investisseurs un actif répondant à une certaine insécurité ambiante, tant sur plan économique que géopolitique. Il conviendra donc d’éviter, tant que possible, ces risques, aussi dans ses investissements obligataires, afin que l’actif de la sécurité ne soit pas, comme il le fut en 2022, source d’une volatilité et d’une inquiétude trop importantes. Nous raisonnerons donc ici en termes de risques en place et de directions à privilégier ou à éviter en face de ces risques, encore très prégnants ou en cours de constitution, qu’il s’agisse de l’inflation, de la possible récession, de la volatilité, d’un rebond des défauts, etc… Peu de rédaction dans ces lignes directrices mais plutôt des indications et des observations, que nous détaillerons, pour les lecteurs qui souhaiteront participer, dans notre présentation annuelle du 10 janvier 2023 (inscription au Webinar ici)
A) L’inflation
Eviter les bascules de duration trop soudaines dans les portefeuilles dans un contexte volatile et de courbe des taux assez plate. On pourra reconstituer un regain de duration dans les portefeuilles, notamment institutionnels, par accumulation progressive.
Limiter les secteurs consommant beaucoup d’énergie, notamment en amont des publications du T4 2022 et du T1 2023. On limitera notamment l’industrie lourde, la chimie et le secteur aérien.
Constituer une poche résiliente ou profitant de l’inflation : énergie et para-énergie, entreprises à fort pricing power, notamment dans l’agroalimentaire ou la technologie de spécialité.
Compte tenu de l’extrême volatilité sur les sous-jacents de l’inflation et de l’inflation déjà anticipée, les indexées inflation resteront très volatiles, éminemment spéculatives et peu protectrices.
B) La récession
Limiter les secteurs cycliques, en particulier la restauration, les loisirs, la publicité, la politique restrictive des banques centrales ayant peu de prise sur l’inflation exogène liée aux matières premières et jouant probablement à plein sur une quantité très limitée de variables, dont les secteurs sus-cités, déjà touchés de plein fouet par la crise de la Covid.
Agilité sur les obligations souveraines et la duration afin de protéger son portefeuille en temps voulu.
Compte tenu de la courbe de taux plate et de la bonne liquidité des entreprises en ces temps difficiles, les titres High Yield courts offrent une bonne rémunération pour un risque de défaut limité. Ils pourront constituer une base de rendement solide capable d’amortir quelques mouvements de marché sur un portefeuille.
Choisir des entreprises au Track-record long, ayant déjà, de préférence, connu des phases de récession et de taux élevés.
C) Risque géopolitique
Limiter les émergents sur le segment obligataire (tandis qu’il pourra constituer un vecteur de performance à moyen terme sur les actions), d’autant que le surplus de rendement qu’ils apportaient dans la période des taux faibles est moins utile aujourd’hui aux investisseurs.
Eviter tout investissement en Chine, en particulier dans le contexte Ukraine/Taïwan.
Limiter les émetteurs d’Europe de l’Est, sensibles à la crise ukrainienne, que ce soit en termes de coûts d’énergie ou d’activité.
D) Risque de taux, refinancement
Eviter les bluechips très capitalistiques et peu rémunérateurs : immobilier, telcos, utilities.
Ces bluechips pourraient faire partie de la liste des fallen angels (émetteurs passant dans la catégorie High Yield), tout comme les entreprises à faibles cash flows, déjà touchées par la crise de la Covid et subissant aujourd’hui des hausses de coûts ou des chutes d’activité. Ces émetteurs, bénéficiant par nature d’une bonne réputation passée, auront tendance à proposer des émissions primaires en tout début d’année (alors que les investisseurs ont encore peu vu de comparables et ont encore beaucoup de trésorerie à investir) avec des primes apparemment attractives, pour se financer à bon compte avant de potentielles dégradations de qualité ou de rating. Nous citerons notamment cette semaine l’émission JC Decaux, connu comme un émetteur à la dette quasi nulle et aux cash flows solides ; les plus curieux verront que le levier est passé en quelques années de 1x à 4x et que les cash flows ont fondu…
E) Hausse des taux
Elargissement considérable du spectre de l’univers investissable. Alors que nombre d’obligations étaient, il y a encore dix-huit mois en taux négatif, on pourra aujourd’hui significativement augmenter la diversification, ce qui est une clé dans une classe d’actifs dont l’objectif principal est de limiter l’impact des risques pour maximiser le rendement embarqué.
Repondération forte du secteur financier, un des seuls secteurs à profiter de la hausse des taux.
Des primes attractives sur le marché primaire, encore attentiste.
Retour des émissions à taux variables, qui pourront revenir dans les fonds de trésorerie alors que l’incertitude sur les taux directeurs reste importante et que les marges de crédit restent élevées.
F) Marché primaire
Retour des primes d’émission de 30 à 100 points de base après des années durant lesquelles le pouvoir était du côté des émetteurs. Bien appréhendé, le marché primaire peut offrir quelques points de base complémentaires à un portefeuille sur une année comme 2023.
Rester attentif aux émetteurs forcés qui paieront des primes d’autant plus attractives : les banques du fait de la réglementation, certains LBOs et certaines Blue chips aux stocks de dette pharamineux.
Retour de la protection du porteur : après quelques années de prospectus ‘covenant light’, la hausse des taux et le retour à la raison devraient offrir des émissions obligataires plus protectrices des investisseurs.
S’il est difficile de résumer une allocation en quelques lignes, nous espérons avoir soulevé quelques questions et idées pour nos lecteurs, que nous engageons vivement à nous solliciter pour tout approfondissement. Nous serons heureux, en ce début d’année, de partager nos points de vue, alors que la conjoncture reste plus qu’incertaine, comme en témoignent les divers papiers de conjoncture desquels ne se dégage pas grand consensus… Toute l’équipe Octo AM se joint à moi pour souhaiter à nos investisseurs, partenaires et lecteurs une excellente année 2023 !
Matthieu Bailly , Janvier 2023
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