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L’ « alignement des planètes », une illusion ?

Début 2015, les investisseurs étaient plein d’espoirs quant à une amélioration sensible des résultats des entreprises européennes. Ils anticipaient l’impact très favorable de l’« alignement des planètes » dans les comptes des entreprises cotées...

Début 2015, les investisseurs étaient plein d’espoirs quant à une amélioration sensible des résultats des entreprises européennes. Ils anticipaient l’impact très favorable de l’« alignement des planètes » [1] dans les comptes des entreprises cotées. Les résultats semestriels estivaux ont laissé les investisseurs sur leur faim et se sont focalisés sur des éléments macroéconomiques tels que la santé de l’économie chinoise et l’efficacité des politiques monétaires accommandantes. Après la récente vague de publications de résultats du troisième trimestre, un premier bilan s’impose afin de déterminer si le rebond des bénéfices en Europe se manifeste.

1. Analyse conjoncturelle

Selon les données publiées par Bloomberg, au cours du 3e trimestre, les chiffres d’affaires cumulés des entreprises membres de l’indice Stoxx 600 ont baissé de 6.5% et les bénéfices par actions de 21.5% en glissement annuel. Certes, ces chiffres incluent une baisse de plus de 52% des bénéfices des sociétés membres du secteur pétrolier et l’effondrement des bénéfices de Volkswagen, mais même retraités de ces éléments spécifiques les bénéfices consolidés sont en décroissance. L’ « alignement des planètes » n’a manifestement pas été suffisant pour que les entreprises européennes retrouvent massivement le chemin de la croissance :

  • La baisse de l’euro, favorable aux sociétés exportatrices, n’a pas été suffisante pour compenser le ralentissement de la demande mondiale, notamment en Chine dont le modèle de croissance évolue d’une économie industrielle exportatrice vers une économie centrée sur la consommation interne. Ainsi, les entreprises du secteur des biens d’équipements connaissent une chute de leur activité assez brutale à l’image de Schneider Electric, Siemens ou bien même BASF.

En outre, la chute des devises émergentes face à l’euro (Real, Livre Turque) s’est accentuée cet été, induisant un effet de change négatif sur les bénéfices, ce qui n’était pas anticipé début 2015.

  • Les effets bénéfiques de la baisse des prix du pétrole qui devaient réduire les coûts des entreprises et relancer le pouvoir d’achat des ménages ne sont pas flagrants. Les entreprises couvrent leurs achats de pétrole et de matières premières qui en dérivent, elles ne bénéficieront de la baisse de leur facture énergétique qu’en 2016 au plus tôt. La consommation des ménages reste atone, comme l’attestent les dirigeants de Publicis et de TF1 qui n’entrevoient pas de rebond des dépenses publicitaires d’ici à la fin de l’année, ce qui est souvent un indicateur avancé de la reprise de la consommation.
  • Les effets multiplicateurs du QE [2] sur la demande industrielle ne sont pas encore au rendez-vous. Les sociétés exposées à l’industrie et au secteur immobilier, telles que Saint Gobain et Imerys, ont publié des chiffres décevants et les dirigeants des sociétés ont affirmé ne pas observer de reprise de l’activité sur leur marché domestique.

Malgré tout, certaines entreprises et secteurs retrouvent le chemin de la croissance sur le marché européen, notamment dans le secteur automobile où la reprise des ventes européennes est visible après 5 ans de contraction.

Les secteurs du tourisme et des transports sont également dans une dynamique positive bénéficiant de l’afflux de touristes étrangers en raison de la baisse de l’euro et la hausse des flux touristiques intra Europe compte tenu du contexte géopolitique en Afrique et au Moyen Orient. De même, dans la péninsule ibérique et en Italie, des signes de reprise se confirment dans des secteurs cycliques comme l’habillement, la construction et la distribution.

2. Conclusions de Myria AM

Même si cela n’est pas encore visible, Myria AM pense toujours que la baisse simultanée de l’euro, du pétrole et des taux d’intérêts qui se maintiennent depuis plusieurs mois à des niveaux bas devrait peu à peu bénéficier aux entreprises.

  • Le QE n’a débuté que depuis 6 mois, et il n’est pas étonnant que ses effets bénéfiques ne se manifestent pas encore dans les comptes des entreprises (en dehors de la baisse mécanique des frais financiers). Si l’on se réfère au marché nord-américain, il a fallu attendre plus d’un an pour que les effets du premier QE initié en novembre 2008 se ressentent.
  • La baisse du pétrole va commencer à être bénéfique début 2016, notamment dans le transport aérien.
  • Les effets bénéfiques de la baisse de l’euro sont quant à eux conditionnés à la bonne tenue de la demande extérieure, sauf dans certains secteurs comme l’aéronautique ou le luxe qui en bénéficient déjà. À court terme, il faudra rester vigilant quant à la teneur des mesures qu’annoncera la BCE le 3 décembre. En effet, la hausse des marchés actions [3] a été nourrie par les discours très accommandants des banques centrales, notamment de la BCE qui a, le 22 octobre dernier, dévoilé son intention d’intensifier le QE, et non par les fondamentaux économiques des sociétés cotées.

3. Recommandations de Myria AM

Dans ce contexte, Myria AM privilégie les sociétés dont les moteurs de croissance sont endogènes, notamment dans les secteurs suivants :

  • La santé où la croissance structurelle s’accélère après plusieurs années pénalisées par la « falaise brevetaire » et où les valorisations restent raisonnables ;
  • L’aéronautique, industrie à cycle long dont les carnets de commandes sont pleins ;
  • Les télécoms où la déflation se tarit progressivement après des années de guerre des prix ;
  • Les services aux entreprises, vivier de sociétés spécialisées bénéficiant de la tendance des entreprises clientes à se focaliser sur leurs métiers historiques pour externaliser certaines fonctions (certification, blanchisserie, nettoyage …)

Nicolas Lasry , Novembre 2015

Notes

[1] Caractérisé par la baisse simultanée de l’euro, du pétrole et des taux d’intérêts

[2] Quantative Easing

[3] 10.9% pour le Stoxx 600 depuis le 1er janvier 2015

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