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Juridique et Fiscalité

ISF et Biens Professionnels

Dans quelle mesure les biens professionnels sont-ils éligibles à l’ISF ? La question est plus complexe qu’elle n’en a l’air. Il convient en premier lieu de faire la distinction entre l’entreprise individuelle, les sociétés de personnes et les titres de sociétés de capitaux. L’analyse de Michel Brillat, Directeur Clientèle Patrimoniale et Entrepreneuriale de l’UFF...

L’entreprise individuelle

Les biens utilisés et nécessaires à l’exercice d’une profession dans le cadre d’une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont exonérés d’ISF [1]. Ils doivent être inscrits à l’actif du bilan de l’entreprise ou figurer sur le tableau des immobilisations.
Seuls sont exonérés les biens qui se rapportent à l’activité principale de l’exploitant. Cette activité doit être pratiquée de manière effective, habituelle et constante dans un but lucratif. En cas d’exercice de plusieurs professions, l’activité principale est celle à laquelle l’exploitant consacre le plus de temps, même si ce n’est pas celle qui lui rapporte le plus. Il est à noter que lorsque ces activités sont similaires [2] ou connexes et complémentaires [3], elles constituent une seule activité au titre de l’ISF.

Les sociétés de personnes

Si vous exercez votre activité professionnelle principale au sein d’une société de personnes soumise à l’IR [4] dont vous détenez des parts, celles-ci sont exonérées d’ISF en totalité. Elles constituent pour vous un bien professionnel (CGI [5] art.885.O), et ce, quel que soit le pourcentage de parts détenues de la société.

Sont concernées : les SNC [6], les Sociétés Civiles Professionnelles, les SARL [7] de famille ayant opté pour le régime de société de personnes, les EURL [8], les EARL [9].

Attention !

- l’activité doit présenter un caractère industriel, commercial, artisanal, agricole ou libéral ;
- vous devez exercer votre activité à titre principal ; si vous exercez votre activité au sein de plusieurs sociétés de personnes en tant qu’associé, seules les parts de la société dans laquelle vous exercez votre activité principale constituent des biens professionnels exonérés d’ISF, à moins que les activités des différentes sociétés soient similaires ou connexes et complémentaires ;
- enfin, seule la fraction de la valeur de vos parts correspondant aux biens nécessaires aux besoins de l’activité est exonérée d’impôt.

Exemple :
Valeur réelle de l’actif : 1000 €
Valeur de l’actif professionnel : 800 €
Valeur des titres : 600 €
Exonération : 600 x 800 / 1000 = 480 €
Somme taxable : 120 €

Les titres de sociétés de capitaux

Les parts ou actions détenues dans une société soumise à l’IS [10] sont exonérées d’ISF si vous remplissez les conditions suivantes :

- Vous êtes, vous ou votre conjoint, dirigeant de la société.
- Vous ou votre groupe familial détient au moins 25% des titres de la société. Pour obtenir ce seuil de détention de 25%, sont également pris en compte les titres que le dirigeant possède dans une ou plusieurs sociétés interposées, dans la limite d’un niveau d’interposition.
- Votre rémunération au sein de la société représente plus de 50% de vos revenus professionnels.

Le montant de la rémunération perçue par le dirigeant doit être « normal », c’est-à-dire en rapport avec le service rendu, la nature et l’importance de l’activité de l’entreprise.
Les revenus à prendre en compte sont ceux soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories « traitements et salaire », « BIC [11], BA [12]et BNC [13] ».

Seuls les jetons de présence spéciaux alloués au président du conseil d’administration sont pris en compte. La rémunération du président du conseil de surveillance bien qu’imposable dans la catégorie des revenus mobiliers est également prise en compte.
Attention : si chaque conjoint exerce une fonction de dirigeant dans des sociétés différentes, la proportion de 50% s’apprécie pour chacun d’eux distinctement.

Par un arrêt du 26 février 2008, la Cour de cassation rappelle que les conditions relatives à l’exercice des fonctions de direction et à leur rémunération doivent être remplies par le même conjoint ou concubin notoire et non au niveau du foyer fiscal.
Dès lors, un contribuable exerçant des fonctions de direction dans une société holding sans être rémunéré, ne peut prétendre au bénéfice de l’exonération prévue par l’article précité, même si son conjoint exerce des fonctions, rémunérées, au sein des filiales.

Le cas des holdings

Très souvent, les titres de sociétés sont détenus par une holding.
Il existe deux grandes catégories de holdings :

  • les holdings dites « pures », qui se contentent de détenir des participations,
  • les holdings dites « impures » dont font partie les holdings animatrices.

En présence d’une holding, il convient avant tout de déterminer si la société est animatrice de groupe ou non. Une société est considérée comme animatrice de groupe lorsqu’elle participe activement à la conduite de la politique de ses filiales et à leur contrôle, et leur rend, le cas échéant, des services spécifiques d’ordre administratif, comptable, financier, ou immobilier. Ce type de sociétés bénéficie de l’exonération ISF au même titre que les sociétés d’exploitation.

Une question revient souvent au sujet de la rémunération : « Doit-on être obligatoirement rémunéré par la holding animatrice ? »
La fonction de direction au sein de la holding animatrice peut ne pas être rémunérée si deux autres conditions sont réunies :
1- Le dirigeant exerce des fonctions de direction au sein d’une ou plusieurs filiales dont la holding détient au moins 50% du capital lorsque celle-ci exerce une activé industrielle ou commerciale propre, ou 25% du capital si elle limite son activité à l’animation du groupe condition.
2- la rémunération perçue en contrepartie de l’exercice des fonctions de direction au sein de la holding animatrice et d’une ou plusieurs de ses filiales excède 50 % des revenus professionnels.

Nouveauté 2012

À compter de l’ISF 2012, l’exonération au titre des biens professionnels est possible en cas d’activités multiples ne présentant pas un caractère soit de similitude, soit de connexité et de complémentarité.
En effet le lien de similitude ou de connexité et de complémentarité ne sera plus exigé pour les parts ou actions de société détenues dans une société soumise à l’IS par les entrepreneurs individuels, les associés de sociétés de personnes ou les associés de capitaux. Toutefois, chaque participation prise isolément doit respecter les conditions requises pour avoir la qualité de biens professionnels (CGI art. 885 O bis).
Ainsi, sans qu’un lien de similitude ou de connexité et de complémentarité soit exigé entre les activités, le redevable :
- peut détenir plusieurs biens professionnels sous forme de parts ou actions de sociétés soumises à l’IS ;
- ou cumuler l’exonération de son entreprise individuelle ou des parts de sociétés de personnes avec les parts d’une société soumise à l’IS dans laquelle il exerce une fonction de direction.

Michel Brillat , Mai 2012

Notes

[1] Impôt de Solidarité sur la Fortune

[2] Les activités similaires s’apprécient en comparant la nature des activités exercées et l’objet auquel elles se rapportent.

[3] Les activités connexes et complémentaires impliquent d’une part des rapports de dépendance capitalistique (connexité) et d’autre part que ces activités s’inscrivent en aval ou en amont l’une de l’autre (complémentarité).

[4] Impôt sur le Revenu

[5] Code Général des Impôts

[6] Sociétés en Nom Collectif

[7] Sociétés à Responsabilité Limitée

[8] Entreprises Unipersonnelles à Responsabilité Limitée

[9] Exploitations Agricoles à Responsabilité Limitée

[10] Impôt sur les Sociétés

[11] Bénéfices Industriels et Commerciaux

[12] Bénéfices Agricoles

[13] Bénéfices Non Commerciaux

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