›  Opinion 

Brexit : Les leçons de l’Histoire

Les Britanniques, sous le regard du monde entier, ont fait leur choix : c’est une victoire massive du « Out ». Ce vote exprime certes le rejet de l’appartenance à l’Union Européenne mais il exprime davantage le rejet d’un modèle de société dans lequel les populations ne se retrouvent plus. C’est pourquoi les multiples évènements des prochains mois devront être suivis avec beaucoup de vigilance...

Les Britanniques, sous le regard du monde entier, ont fait leur choix : c’est une victoire massive du « Out ». Ce vote exprime certes le rejet de l’appartenance à l’Union Européenne mais il exprime davantage le rejet d’un modèle de société dans lequel les populations ne se retrouvent plus. C’est pourquoi les multiples évènements des prochains mois devront être suivis avec beaucoup de vigilance. Après des années de crise financière et économique, le risque politique et social est en train de se matérialiser.

 ? Un choc « spécifique » négatif pour le Royaume-Uni et une transmission au reste de l’Europe via le canal financier à court terme

Le Brexit constitue d’abord un choc « spécifique » négatif sur la croissance du Royaume ?Uni

Sur le plan politique, s’ouvre une période d’incertitude politique élevée au Royaume ?Uni accentuée par la possibilité d’un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Écosse et des questionnements sur l’avenir de l’Irlande du Nord. 

Sur le plan économique, la hausse de l’incertitude pèsera sur l’investissement et nous amènera à réviser nos prévisions de croissance et d’inflation.

Le choc conjoncturel couplé à une croissance durablement déséquilibrée (fort endettement du secteur privé, déficit « jumeaux » du secteur public et de l’externe, système économique polarisé sur la finance et l’immobilier) augmente le risque ?pays et entrainera une dégradation du rating du Royaume ?Uni (perte du AAA pour S&P, passage de Aa1 stable à une perspective négative pour Moody’s). 

Sur le plan monétaire, les incertitudes financières vont immédiatement conduire la Banque d’Angleterre à injecter toutes les liquidités nécessaires pour éviter une crise de liquidité et maintenir la stabilité financière. 

La transmission de ce choc sur le reste du monde (singulièrement la Zone euro) dépendra de l’amplitude des chocs financiers et politiques 

Même si le reste du monde paraît aujourd’hui plus à même d’absorber un choc exogène grâce à des politiques monétaires et budgétaires de plus en plus accommodantes, le Brexit n’en constitue pas moins un choc supplémentaire dans un environnement de croissance modérée et fragile. 

Au vu de la forte instabilité financière, la transmission du Brexit aux autres pays s’effectue à court terme essentiellement au travers du canal politique et financier (non du canal commercial) que reflète la baisse des actions, l’écartement des spreads de crédit et la hausse des parités face à la livre. Les blocages politiques et institutionnels et le resserrement des conditions financières, s’ils persistent, pourraient peser sur l’investissement. Il est encore trop tôt pour quantifier l’impact sur la croissance qui sera fonction de l’amplitude et surtout de la durabilité du choc financier. 

A minima, à l’instar de la Banque d’Angleterre, l’ensemble des banques centrales (Fed, BCE, BNS, …) ne prendront aucun risque dans la gestion de la liquidité vis ?à ?vis des contreparties financières. L’écartement des spreads de crédit pourrait conduire la BCE à augmenter ses achats de dettes corporate. Cette accélération est tout à fait prévue dansle CSPP (programme d’achats de titres corporate de la BCE) qui est très flexible de ce point de vue ; l’implémentation de cette flexibilité devrait constituer l’assouplissement suffisant face à la montée desincertitudes. Du coté de la Fed, nous maintenons un resserrement en 2016, en septembre ou vraisemblablement en décembre, après les élections.

 ? A moyen terme, l’impact économique pourrait s’amplifier pour le RoyaumeUni et le défi institutionnel devenir plus urgent en Zone euro

L’ampleur du choc économique pour le Royaume ?Uni dépendra à moyen terme de la  négociation des nouveaux accords commerciaux

A moyen/long terme, le Brexit engendrera des coûts supplémentaires pour le Royaume ?Uni induits principalement par le gel des investissements (étrangers et domestiques) et la limitation de l’immigration. L’impact négatif supplémentaire sur le PIB ne pourra être quantifié qu’une fois que se dessineront les termes et délais nécessaires à la signature de nouveaux accords commerciaux entre le Royaume ?Uni et le reste du monde. 

Pour la Zone euro, le Brexit accroît la pression sur les enjeux institutionnels

Le Brexit pourrait constituer un nouveau choc politique majeur puisqu’en mettant fin à l’arrimage du Royaume ?Uni au continent européen, il crée un précédent et ouvre la voie à d’autres pays qui auraient des velléités de sortie de l’Union Européenne.

Dans ce contexte, les pays fondateurs, en particulier le couple franco ?allemand, joueront un rôle central sur la poursuite du projet européen. Si une nouvelle volonté politique avec un nouveau projet de société répondant aux aspirations des opinions publiques apparaissait rapidement, alors cet événement pourrait constituer l’opportunité d’accélérer la construction européenne, notamment par la mise en place concrète du rapport des Cinq Présidents.

L’enjeu principal au cours des deux prochaines années, sera les négociations qui s’engageront entre les deux parties, d’une part pour sortir de l’UE, et d’autre part, pour mettre en place de nouveaux accords. Rappelons également que le Royaume ? Uni devra négocier de nouveaux accords commerciaux avec 53 pays.

  • LES IMPLICATIONS DANS LA GESTION DE NOS PORTEFEUILLES

La décision du peuple britannique plonge les marchés mondiaux dans une zone d’incertitudes majeures. Nous entrons maintenant en territoire inconnu.

La réaction immédiate des marchés à l’ouverture est violente, les actifs risqués chutent fortement et les taux connaissent des niveaux inédits. La volatilité sur les marchés a de nouveau bondi.

Dans ces moments fortement troublés, il convient néanmoins de prendre un peu de recul sur les impacts marchés. En effet, si la livre et les taux « core » atteignent des points bas, les actions et les spreads de crédit retrouvent en fin de matinée leur niveaux de mi ?juin quand la probabilité de Brexit apparaissait au plus haut dans les pronostics.

Il est maintenant important de suivre les possibles effets de contagion sur le risque politique en Europe à l’aune d’échéances importantes, notamment en Espagne.

Les interventions attendues des banques centrales et des politiques dans ce contexte seront des facteurs importants pour la stabilisation des marchés. La BoE a déjà fait part de mesures de liquidités exceptionnelles et annonce la possibilité de nouvelles actions. Les banques centrales semblent en phase de coordination.

Positionnement de nos fonds en amont du referendum

En termes de positionnement, en amont d’un vote dont l’issue était incertaine, nous avons réduit les risques relatifs et absolus de nos fonds.

Nous avons globalement baissé nos expositions sur le risque britannique que ce soit sur le crédit ou les actions.

Sur lestaux, nous avonsréduit notre exposition aux dettes périphériques, renforcé nos positions d’aplatissement sur les courbes des pays « core » et acheté de la protection sur le crédit.

Sur les actions, nous avons principalement une sous pondération sur le secteur bancaire. Sur nos fonds multi ?actifs, la protection a été mise en place via le change, dollar ou GBP.

Et maintenant, qu’allons ?nous faire ? 

La période qui s’ouvre est une période de forte incertitude, politique, économique et financière.

Dans ce cadre, la volatilité va rester le maître mot sur les marchés. 

En l’absence de visibilité, nous maintenons notre positionnement, les primes de risque devraient rester importantes et lestaux sur des niveaux inédits.

Nous sommes vigilants sur le risque politique dans nos fonds. Nous attendons des initiatives des gouvernements et des banques centrales pour réactiver nos expositions en risque. Dans l’attente de ces interventions, nous saisirons les opportunités offertes par les fortes variations de marché.

En conclusion, les déséquilibres profonds, révélés il y a près de dix ans lors de la crise financière et économique, conduisent à un rejet de la globalisation, perçue par l’opinion publique comme synonyme de chômage, de croissance des inégalités et de paupérisation de la classe moyenne. Ce n’est pas un hasard si les tenants du « Brexit » ont fait campagne sur la souveraineté et l’immigration, des thématiques très populistes dans des périodes de rupture. 

En choisissant un saut vers l’inconnu, le peuple britannique a exprimé un « rasle bol » vis ?à ?vis d’un monde dirigé par les marchésfinanciers et l’économique. Le Royaume ?Uni qui a souvent joué le rôle de « laboratoire » nous annonce t ?  il une ère nouvelle ?

 

Groupama-AM , Juin 2016

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