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Krach obligataire très peu probable en 2013

La probabilité d’un krach obligataire semble aujourd’hui très faible, en zone euro comme aux Etats-Unis, tant l’environnement paraît peu propice à une hausse de l’inflation ou à un durcissement monétaire.

Le krach obligataire, conséquence d’une révision brutale des anticipations de politique monétaire ou d’inflation

Sans que cette expression soit précisément définie, on peut qualifier de « krach obligataire » un mouvement par lequel les opérateurs de marché, suite à une révision brutale de leurs anticipations de politique monétaire ou d’inflation (anticipations en général liées), sont conduits à vendre collectivement et massivement les obligations qu’ils détiennent. Ils accélèrent alors la hausse des rendements contre laquelle ils tentent de se prémunir, les portant nettement audessus de leur valeur d’équilibre. Ainsi, le terme « krach obligataire » évoque immanquablement ce qui s’est produit en 1994, après le relèvement, en février de cette année là, des taux de la Réserve Fédérale américaine (Fed) 3,0% 3,25%. Cette décision inattendue (la communication de la Fed était, à l’époque, beaucoup moins transparente qu’aujourd’hui) avait généré des anticipations de très fort durcissement de la politique monétaire, provoquant une vive hausse des rendements (particulièrement sensible sur les maturités courtes) et des pertes importantes pour les portefeuilles obligataires.

Le krach obligataire se distingue à la fois d’une remontée « normale » des taux et d’une crise souveraine

Par cette dimension de surprise, un krach obligataire se distingue de la hausse, même rapide, des rendements qui se produit dans une phase de reprise économique correctement anticipée, accompagnée d’une révision haussière correspondante des attentes en matière d’inflation et de politique monétaire. Ainsi, en 2004 ou, plus près de nous, en 2009, en accompagnement de reprises économiques, les rendements obligataires se sont tendus progressivement sans générer de surprise majeure. Un krach obligataire se distingue également d’une crise souveraine, du type de celle qui a frappé plusieurs pays de la zone euro depuis 2009, où c’est le risque de défaut d’un pays (à la manière du risque de crédit d’une obligation d’entreprise), et non pas, directement, les perspectives de politique monétaire, qui fait fuir, parfois de façon brutale, les investisseurs. Enfin, un krach obligataire diffère du cas, plutôt qualifié de « crise de change », où les capitaux internationaux se détournent de la dette d’un pays suite à une anticipation de forte dépréciation de sa devise.

Pas d’« effets de second tour » d’inflation salariale, donc pas d’anticipation de hausse des taux directeurs précoce

La probabilité d’un krach obligataire semble aujourd’hui très faible, en zone euro comme aux Etats-Unis, tant l’environnement paraît peu propice à une hausse de l’inflation ou à un durcissement monétaire. En zone euro, rappelons que le marché du travail très dégradé empêchera sans doute, sauf peut-être en Allemagne, tout effet dit de « second tour » de hausse des salaires même si les ménages peuvent continuer à subir des hausses de prix liées aux plans d’austérité (TVA, tarifs publics) ou à des mouvements de prix d’actifs (pétrole notamment). Loin de générer une spirale inflationniste, de telles hausses de prix risquent surtout de déprimer encore plus l’économie et de peser davantage sur les salaires ! Or c’est surtout aux « effets de second tour » salariaux qu’est attentive la BCE. En leur absence, une hausse de taux directeurs est extrêmement improbable (c’est plutôt une baisse qui se profile) et les marchés ne sont sans doute pas près de réviser leurs anticipations en la matière. Aux Etats-Unis, rappelons que la baisse régulière du taux de chômage masque une situation réelle du marché de l’emploi qui reste très dégradée, comme le montre la faiblesse persistante du taux d’emploi (c’est-à-dire, de la part de la population en âge de travailler qui est effectivement employée : les découragés qui sortent de la population active ne sont plus comptabilisés dans les chiffres du chômage). Par conséquent, là aussi, une inflation portant sur les salaires est peu probable. Qui plus est, la Fed a pris soin de donner aux investisseurs des repères concernant les déterminants d’une future hausse de taux : celle-ci ne devrait pas intervenir tant que le taux de chômage ne tombe pas endeçà de 6,5% et que les anticipations d’inflation à un an ne dépassent pas 2,5%. Enfin et surtout, un mouvement brutal sur les taux longs est d’autant moins probable que la Fed s’est donnée, via ses opérations de « Quantitative Easing » (cf. article 4), les moyens d’intervenir directement sur ces maturités. Et lorsque viendra le jour de déboucler ces mesures nul doute que la Fed veillera à y préparer les marchés.

Dans tous les cas, les banques centrales ont beaucoup appris en termes de communication

C’est peut-être cet élément de communication et de transparence des banques centrales qui a le plus changé la donne depuis le krach obligataire de 1994. Tant du côté de la Fed que de la BCE, force est de constater le soin que mettent désormais (bien plus qu’il y a vingt ans !) les banques centrales à gérer les anticipations des acteurs économiques. La communication est devenue un instrument aussi important que les décisions de politique monétaire elles-mêmes. Nous ne prévoyons pas de durcissement monétaire ni de retrait rapide des programmes d’achats d’actifs des banques centrales, mais s’ils devaient tout de même avoir lieu, il est fort probable qu’ils seraient annoncés longtemps à l’avance.

Equipe Stratégie & Recherche Economique, Amundi , Janvier 2013

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