Zone Euro : 3 Scenarios pour demain

Premier volet d’une série de trois articles sur les perspectives de la zone euro. Pour sortir de la crise, trois scenarios sont envisageables. Le plus probable étant malheureusement celui d’une sortie d’un ou plusieurs pays de l’Union économique et monétaire.

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Les marchés ne changeront jamais. Ils ont cette capacité incroyable d’oublier très vite ce sur quoi ils se sont longtemps focalisés et une capacité tout aussi incroyable à se reconcentrer sur leurs peurs initiales. On se souvient de la forte période d’aversion au risque née de la crise des souverains périphériques (essentiellement la Grèce) entre février 2010 et juin 2010 (le plan de « sauvetage du 10/05/2010 avec la création du FESF calmant les choses) et qui avait fait plonger la parité euro-dollar jusque vers 1.1850.

On se souvient ensuite que la fragilité des dettes souveraines périphériques européennes n’intéressait plus personne puisque de mi-juin 2010 à début novembre, le seul focus était celui des fondamentaux de l’économie américaine et de l’assouplissement quantitatif de la politique monétaire de la FED propulsant l’euro/dollar jusque vers 1.43 (qu’elle semblait alors loin l’implosion de la zone Euro).

Mais adorant très vite ce qu’ils ont brulé et brulant tout aussi vite ce qu’ils ont adoré, les marchés ont racheté massivement du dollar contre euro en redécouvrant le risque souverain en Europe (maintenant l’Irlande, demain le Portugal, après demain sans doute l’Espagne). Nous n’avons pour notre part jamais oublié les problèmes structurels de la zone et remettons en avant les différents scénarios que nous envisagions quant à l’avenir de l’Union économique et monétaire.

Premier scénario qui eut été, à nos yeux, le scénario idéal, celui d’une vraie réforme de la zone euro avec la mise en place d’un gouvernement économique et d’un vrai fédéralisme fiscal. C’est une solution longue à mettre en place qui ne se décrète pas en un week-end. Depuis près de 12 ans d’existence de la zone Euro et nombre de sommets, nous n’avons pas assisté à la moindre tentative d’ébauche de construction pouvant aller dans ce sens. Certains disent que les grands projets se construisent dans les crises, encore faut-il avoir les hommes d’état qui vont avec.

Nous n’accordons donc pas une grande crédibilité à ce scénario et c’est d’autant plus dommage que l’on sait que c’est par des réponses politiques fortes que la spéculation déstabilisante est souvent cassée sur les marchés financiers (on se souvient des réponses à la crise du SME au début des années 1990 : réforme du système avec élargissement des marges de fluctuation entre monnaies de +/- 2.25% à +/-15% en août 1993 ; et surtout accélération de la construction monétaire européenne sous l’impulsion du couple franco-allemand).

La sortie de la zone d’un ou plusieurs pays dans un contexte d’aggravation des crises sociales

Le second scénario, malheureusement plus réaliste, serait celui d’une sortie de la zone d’un ou plusieurs pays (on pense naturellement aujourd’hui à la Grèce, à l’Irlande et au Portugal). Ce scénario prendrait corps avec une aggravation de la crise sociale qui aurait tôt fait de se transformer en crise politique. Il ne faut jamais sous-estimer la colère des populations et son exploitation par le populisme et la démagogie de certains politiques qui associeront malheurs du pays à l’appartenance à la zone Euro.

Le coût économique d’une sortie de la zone d’un des pays membres serait très élevé en lui coupant l’accès définitif aux marchés (vous me direz les pays en question se sont pour l’instant coupés de l’accès normal aux émissions sur les marchés obligataires de la zone) ; malgré cela, seuls les avantages -si tant est qu’ils en soient- seraient mis en avant au niveau du pays : forte dévaluation de la nouvelle monnaie par rapport à l’euro, redénomination de la dette et répudiation par une forte inflation.

Le scénario intermédiaire aurait été celui d’un véritable accompagnement par l’UEM des pays en grandes difficultés budgétaires : faire en sorte que les politiques budgétaires restrictives mises en place soient menées parallèlement à une politique monétaire accommodante (ce qui est globalement le cas) et à une politique de change également très accommodante (qui suppose donc une forte baisse de l’euro contre les grandes devises, ce qui n’est pas vraiment le cas contre sterling et dollar). On se souvient qu’au début des années 1990 des pays tels que le Canada, la Finlande et la Suède avaient réussi à restaurer leurs finances publiques en facilitant la restriction budgétaire grâce à une forte baisse des taux courts et une fore dévaluation compétitive de la monnaie nationale.

Le problème aujourd’hui pour la zone, c’est qu’il y a deux obstacles à un affaiblissement de la monnaie unique : d’une part, on voit mal les anglo-saxons accepter une réévaluation forte du dollar et du sterling contre euro ; d’autre part on voit mal l’Allemagne (politiques, Axel Weber et opinion confondus) accepter un affaiblissement significatif de l’Euro puisque l’héritage de la Bundesbansk est toujours bien présent. Au total, probabilité très faible pour le scénario 1, assez faible pour le scénario 3 et plutôt forte pour le scénario 2.

Mory Doré , Janvier 2011

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