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Les marchés financiers doivent s’adapter au retrait inéluctable des interventions non conventionnelles des Banques Centrales

Selon Charles Bouffier, Directeur général délégué, Responsable de la Gestion chez EGAMO, les comportements relevant d’un équilibre sain entre l’offre et la demande d’épargne se trouveront favorisés par la réduction des anticipations d’interventions non conventionnelles des Banques...

Ce mois d’Octobre 2014 marquera la fin des achats réguliers d’obligations du Trésor et de titres hypothécaires par la Fed : dans le cadre de ses programmes successifs de Quantitative Easing initiés en 2008, elle aura au total procédé à l’achat de plus de 4 000 milliards de Dollars d’actifs, injectant autant de liquidités dans les marchés et l’économie. Ce mois d’Octobre 2014 marque aussi l’annonce par la BCE des modalités de mise en place de son programme de rachat d’ABS et d’obligations sécurisées, en accompagnement de la mise en œuvre du TLTRO, tout juste initié en septembre 2014, et qui s’étendra sur deux ans au moins.

Avec la fin du QE aux Etats Unis dans un contexte de croissance économique qui se raffermit, et avec la mise en œuvre progressive des actions non conventionnelles déjà annoncées en zone Euro, dans un contexte économique très poussif, la désynchronisation des cycles économiques et monétaires des deux rives de l’Atlantique se confirme donc.

Pourtant, les mauvais chiffres de l’activité dans les trois premières économies de la zone Euro n’ont pas incité la BCE à renforcer l’hypothèse d’un QE sur titres d’Etat. Lors de sa conférence de presse du 2 Octobre, Mario Draghi s’en est tenu à réaffirmer que la BCE utiliserait tous les moyens supplémentaires nécessaires dans le cadre de son mandat, en cas de besoin, sans plus de précisions.

Dès lors, l’anticipation par les marchés de la mise en œuvre d’un QE complémentaire sur titres d’Etat en zone Euro a nettement régressé, à l’horizon de la fin de l’année au moins.

Objectivement, la question de l’efficacité de telles mesures complémentaires sur titres souverains, dans une situation de taux déjà aussi bas, se pose. Les réticences de l’Allemagne à une forme de mutualisation des dettes souveraines est par ailleurs vigoureuse. La BCE souhaite enfin pouvoir juger, légitimement, de l’efficacité des mesures déjà prises.

Actuellement, les marchés s’interrogent principalement sur le timing de la remontée annoncée du taux des Fed Funds outre Atlantique, sur le montant possible de la taille du bilan de la BCE à l’issue des opérations en cours et surtout, sur l’évolution des fondamentaux de l’économie réelle, partout dans le monde.

Le retour des fondamentaux de l’économie au cœur de la préoccupation des marchés financiers marque un changement de tempo majeur : dans la période précédente, ces mêmes marchés étaient principalement guidés par l’anticipation de toujours plus d’interventions des Banques Centrales. Cette anticipation du "Toujours Plus" non conventionnel se matérialisait par l’anesthésie asymétrique des mauvaises nouvelles, produisant ainsi des niveaux de volatilité très bas, alors même que les risques de toutes natures ne semblaient pas se réduire. Dans un contexte de liquidités surabondantes, les niveaux de valorisation des actifs risqués étaient ainsi très élevés.

La prise en compte du réel va inexorablement produire un retour de la volatilité.

Dans le même temps, justifier des progressions à deux chiffres du prix de certaines classes d’actifs risquées va devenir plus délicat, sur la base d’une économie mondiale en croissance d’à peine plus de 3%. Le couple performance -volatilité sera donc moins favorable dans les prochains mois qu’il ne le fut au cours de ces deux dernières années. Cette volatilité accrue nécessitera d’être à la fois réactifs et vigilants, pour satisfaire durablement les objectifs de rendement des mandats assurantiels obligataires et diversifiés, dans le cadre des règles et contraintes définies pour chacun.

Par ailleurs, l’ajustement des attentes implicites de performance sur les marchés, plus en rapport avec ce que permet le fonctionnement normal de l’économie, servira une Finance plus Responsable.

Les investisseurs doivent être raisonnablement rémunérés pour le risque qu’ils acceptent de prendre, et le service qu’ils rendent, en finançant les agents économiques et les Etats. C’est la mission essentielle, la raison d’être de l’industrie financière, que de créer les conditions d’une négociation équilibrée en mettant en relation les agents en situation d’excès d’épargne et les agents qui ont des besoins de financement.

Lorsque les exigences de performance des marchés boursiers deviennent sans commune mesure avec ce que les agents économiques peuvent produire, des dérèglements peuvent se produire à terme. De même, et en sens inverse, lorsque l’écrasement de la rémunération du risque sur les marchés obligataires devient excessive, les distorsions induites dans le comportement tant des émetteurs que des investisseurs (prise de risque excessive pour les uns, surendettement pour les autres) trouvent également leur résultante dans une perte de repères globaux.

La réduction des anticipations d’interventions non conventionnelles des Banques Centrales incite la sphère financière à s’adapter au réel tel qu’il est : les comportements relevant d’un équilibre sain entre l’offre et la demande d’épargne s’en trouveront favorisés et la pérennité du financement de l’économie assurée, de manière Responsable.

Charles Bouffier , Octobre 2014

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