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Les fonds de pension européens forcés d’innover face à une faible espérance de rendement et une forte volatilité

Dans un contexte de marché jugé difficile, les fonds de pension européens tendent de plus en plus à s’éloigner de l’approche d’investissement traditionnelle pour trouver de nouvelles sources de rendement

  • Les actifs illiquides, et l’utilisation de nouveaux outils d’allocation d’actifs, ainsi que l’ESG (Environnement, Social et Gouvernance) sont ainsi de plus en plus plébiscités
  • En l’absence de réforme, les fonds de pension émettent de plus en plus de doutes quant à la capacité de l’Union Européenne de réagir de façon concertée en cas de nouvelle crise économique
  • La Directive IORP II est perçue comme pouvant favoriser une consolidation du marché européen et l’apparition croissante de fonds de pension transfrontaliers

Selon une nouvelle étude publiée par CREATE-Research et Amundi, leader européen de la gestion d’actifs, les fonds de pension européens adoptent désormais de nouvelles approches d’investissement pour générer du rendement, dans un contexte de crainte d’un nouveau choc économique et d’une perte de confiance dans les institutions politiques européennes.

De fait, la montée du populisme, mise en évidence par les résultats des élections italiennes et du Brexit, et symptomatique de l’effritement de la confiance en l’Union Européenne en tant qu’institution, fait peser de nombreux risques sur les investissements à long terme.

Aussi les fonds de pension tendent à s’éloigner des approches d’investissement traditionnelles et innovent en termes de classes d’actifs, d’allocation d’actifs et d’investissements thématiques.

C’est ce que révèle l’enquête réalisée par Amundi et Create-Research auprès de 149 fonds de pension et caisses de retraite en Europe – représentant un total de 1 890 milliards d’euros d’actifs – afin de donner un aperçu de leur situation dans l’environnement de marché actuel, marqué d’une part par le soulèvement du populisme mais aussi par la réduction des politiques monétaires accommodantes post-crise.

Ci-dessous sont présentées les principales conclusions de l’étude de cette année.

  • Les actifs illiquides toujours favorisés par l’ère de faible espérance de rendement

Concernant tout d’abord leurs anticipations en termes de rendement, les fonds de pension continueront en 2019 à osciller entre prudence et opportunisme. Ils acceptent, certes, une diminution des rendements futurs de la majorité des actifs - une des personnes interrogées soulignant qu’ « il n’y a plus de « jus » dans ce marché haussier. Il n’y a pas de nouveaux boosters à l’horizon. » - tout en souhaitant éviter de passer à côté d’un marché haussier exceptionnel.

Ainsi, près des deux tiers des participants estiment que la recherche de rendement favorisera les actions internationales et les actifs illiquides tels que l’immobilier, les infrastructures et le crédit alternatif. Selon un fonds de pension britannique, ces classes d’actifs offrent en effet une bonne diversification : elles sont très faiblement corrélées avec les classes d’actifs traditionnelles, génèrent un cash-flow régulier et permettent de faire face aux contraintes de passif et ce, indépendamment de l’environnement général.

En revanche, les obligations d’Etats européennes, les actions américaines, le crédit américain de la catégorie « investment grade » ainsi que les actions japonaises sont tous considérés comme surévalués. Selon les sondés, les Hedge funds et les devises sont, pour leur part, les classes d’actifs les plus défavorisées. Bien qu’aucune région ne se démarque par des rendements exceptionnels, l’Asie (à l’exclusion de la Chine), les États-Unis et l’Inde sont classés parmi les trois régions les plus à même d’offrir des rendements décents l’an prochain.

  • La reprise en Europe reste encore à démontrer

S’agissant de la croissance en Europe, une écrasante majorité des participants (environ 80%) s’accorde sur le fait que la récente reprise européenne est cyclique et alimentée par une croissance mondiale synchronisée. Seulement un quart des personnes interrogées pense que l’Europe s’est enfin remise de la crise de 2008. La situation italienne est à ce titre symptomatique du malaise structurel profondément enraciné dans l’Union Européenne : marchés du travail inefficients, investissements physiques contenus et écarts de productivité flagrants entre les pays centraux et périphériques.

Seuls 35% des fonds de pension estiment que l’Europe conserve toutes les chances de rester une région attractive fournissant des rendements décents. En effet, les autorités nationales semblent trop réticentes à rechercher de véritables solutions européennes aux problèmes communs qu’elles affrontent : déficits importants, endettements croissants, affaissement de la productivité et manque d’innovation. Le programme de réformes a besoin d’un second souffle.

Près de 60% des participants considèrent également que l’inertie institutionnelle et politique qui exclue les réformes audacieuses mais nécessaires, a engendré la montée du populisme. C’est une grande source d’inquiétude pour les fonds de pension, qui craignent que l’absence d’action concertée empêche l’Europe de faire face à la prochaine crise économique mondiale quand elle surviendra.

  • L’Union Européenne a besoin d’une vision claire et d’un plan d’action concret

Interrogé par ailleurs sur l’Union Européenne, un des participants souligne que « pour chaque personne qui juge que l’Union Européenne fait des progrès, il en existe une autre qui pense le contraire. » Certes, le Brexit offre à l’Union Européenne une nouvelle opportunité de mettre en place une vision de ce qu’elle souhaite devenir. Mais pour cela trois principales conditions identifiées par les participants du sondage restent à remplir :

La mise en place d’un plan d’actions global assorti d’une feuille de route sur la direction que l’Union Européenne prendra dans un avenir proche ; Un nouvel élan pour renforcer l’Union Monétaire et l’Union des Marchés de Capitaux afin d’améliorer la résilience économique des pays membres ; La réduction du manque de confiance envers les politiciens et les institutions politiques via une amélioration du bien-être social, une diminution des inégalités de revenus et une amélioration de l’employabilité à l’ère du changement technologique.

  • « Risk factor investing » et ESG, les nouveaux outils de diversification et de gestion des risques »

Face à cet environnement, les fonds de pension européens s’orientent de plus en plus vers de nouvelles méthodes d’allocation d’actifs, et de nouveaux outils de diversification. Les trois principales approches d’allocation d’actifs mises en place sont les suivantes : l’investissement dit « Risk factor » (58%), « l’absolute return » non corrélé (53%) et les primes de risques alternatives, dites « alternative risk premia » pour exploiter les anomalies temporaires des prix (48%). Selon l’un des sondés, « la diversification à l’ancienne n’est en effet pas compatible avec une période de forte volatilité et de faibles rendements ».

Dans un horizon de plus long terme, les participants citent comme thème dominant l’ESG. Celui-ci n’est en effet plus considéré comme un exercice de case à cocher, mais comme une approche d’investissement pragmatique face à l’émergence de nouveaux risques.

Il est plus que jamais nécessaire de développer le marché des fonds de pension transfrontaliers en Europe

Enfin, l’étude dresse un état de lieux de la mise en place de la nouvelle directive IORP II.

Avant la première directive IORP en 2003, les employeurs paneuropéens devaient gérer des régimes de retraite distincts pour chaque juridiction, et ce, conformément aux réglementations locales. La nouvelle réglementation IORP II a lancé le processus de consolidation. Si bien que depuis son adoption en décembre 2017, le nombre total d’actifs IORP a augmenté dans toute l’UE.

Cependant, moins d’un quart des fonds de pension sondés la mettent déjà en place à ce premier stade. 60% n’en sont en effet qu’à l’étape de sensibilisation. Et seuls environ 40% s’attendent à ce que le rythme s’accélère. Une des personnes interrogées explique : « nous avons besoin d’un guichet unique qui réduise la complexité de nos régimes de retraites dans l’Union Européenne ».

Professeur Amin Rajan de CREATE-Research, qui a dirigé le projet, commente : « la montée généralisée du populisme à un moment où les Banques Centrales réduisent leurs programmes d’assouplissement quantitatif, génère une nouvelle phase d’incertitude accrue pour les fonds de pension ».

Pascal Blanqué, Directeur des gestions d’Amundi, ajoute : « le risque politique n’est plus une perturbation temporaire, mais a évolué et prend une place centrale sur les marchés économiques et financiers devenus plus fragiles. En réaction, les fonds de pension font preuve d’un grand pragmatisme dans la façon dont ils adressent le sujet. Leurs allocations d’actifs témoignent d’innovations constantes ».

Next Finance , Décembre 2018

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