Les développements politiques récents en Italie, en particulier la présence de membres eurosceptiques au gouvernement, ont à nouveau tourné les projecteurs sur les déséquilibres TARGET2. Dans cette note, nous nous proposons d’expliquer simplement le système TARGET2 et les enjeux qu’ils représentent pour les différentes parties prenantes.
TARGET2, c’est quoi ?
Cette plateforme est gérée par l’Eurosystème.
Comment émergent les déséquilibres TARGET2 ?
Prenons un exemple. Lorsqu’un client d’une banque A effectue un paiement à un client d’une banque B (par exemple pour payer une transaction de marchandises ou l’acquisition d’un titre financier), les dépôts de la banque A sont débités alors que les dépôts de la banque B sont crédités :
Point important : les soldes TARGET2 ne sont pas collatéralisés
Avant la faillite de Lehman Brothers, les banques faisant face à une baisse des dépôts de leurs clients pouvaient facilement compenser celle-ci en empruntant les montants correspondants sur les marchés interbancaires, ce qui explique que les soldes TARGET2 soient restés très limités jusqu’en 2008. La défiance généralisée à partir de 2008, notamment sur les marchés interbancaires, a réduit ce type d’opérations et les banques ont davantage eu recours aux financements proposés par la BCE (forte augmentation des opérations de LTRO). C’est véritablement à partir de ce moment-là que le système de créances/engagements TARGET a commencé à prendre de l’importance en termes de montants.
Comment les soldes TARGET 2 sont-ils rémunérés ou facturés ?
Qu’est-ce qui a fait évoluer les soldes TARGET 2 ?
Comme expliqué plus haut, les soldes TARGET2 ont commencé à grimper après la faillite de Lehman Brothers et la perte de confiance généralisée dans le système financier.
Où se situent les déséquilibres TARGET2 aujourd’hui ?
Quels sont les risques de tels déséquilibres ?
Au moins trois problèmes se poseraient en cas de la sortie de la zone euro d’un pays débiteur dans le cadre de TARGET2 :
1. les soldes négatifs sont de très grande taille par rapport au PIB dans de nombreux cas (Espagne, Italie, Portugal), ce qui implique que les montants à mobiliser pour régler les engagements seraient colossaux,
2. en cas de sortie de la zone euro d’un pays relativement plus faible d’un point de vue économique, sa nouvelle devise serait vraisemblablement plus faible, ce qui alourdirait encore le règlement à effectuer,
3. un pays souhaitant quitter la zone euro aurait-il nécessairement la volonté de solder tous ses engagements ? Nous avons pu voir dans le cas du Brexit que certains politiciens britanniques étaient totalement opposés au règlement du « divorce bill ? »
Dans le scénario catastrophe où l’Italie souhaiterait sortir de la zone euro et refusait de régler ses engagements TARGET2, la BCE enregistrerait ce non-règlement comme une perte et ses actionnaires devraient la recapitaliser. Cela correspondrait (en considérant l’engagement TARGET2 de l’Italie en mai) à un montant de 141 Mds € pour la Bundesbank, 111 Mds € pour la Banque de France, 69 Mds € pour la Banque d’Espagne.
Au final, les déséquilibres TARGET2 (et les pertes potentielles en cas de départ de la zone euro et de nonrèglement des soldes TARGET2) sont aujourd’hui si élevés qu’ils peuvent devenir une véritable source de tensions politiques. Ils pourraient renforcer le pouvoir de négociation de pays débiteurs en cas de négociations compliqués avec les pays du cœur.
Bastien Drut , Juin 2018
[1] Des hausses de taux directeurs occasionneraient également des revenus d’intérêt sur les opérations de refinancement des banques mais le paiement d’intérêts significatifs entre banques centrales nationales pourraient attiser les tensions politiques.
[2] « The Eurosystem’s asset purchase programme and TARGET balances », BCE Occasional Paper, septembre 2017.
[3] « TARGET balances and the crisis in the Euro Area », Philippine Cour-Thimann, Cesifo avril 2013.
[4] Lettre de Mario Draghi aux eurodéputés Marco Valli et Marco Zanni, janvier 2017.
[5] « Italy’s long, hot summer », Carmen Reinhart, Project Syndicate, 31 mai 2018.
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