›  Opinion 

L’environnement a un prix

Les pollueurs s’en tirent à trop bon compte de nos jours : l’environnement étant un bien public, il n’a pas de prix. Mais comment le protéger ? Plutôt par les forces libres du marché que par les incitations des Etats.

Pollution, surexploitation des ressources et changement climatique sont des corollaires négatifs de l’activité humaine. Depuis que les pays en développement connaissent une forte croissance économique et des modèles de consommation similaires à ceux des pays riches, on annonce régulièrement une catastrophe écologique imminente. Deux exemples : en Suisse, il y a 566 voitures pour 1’000 habitants. En Chine, 85 seulement. Et un Allemand consomme en moyenne dix fois plus d’énergie qu’un Indien.

Croissance et durabilité : une contradiction ?

Y a-t-il vraiment incompatibilité entre croissance et durabilité, entre libre déploiement des forces de marché et écologie ? Doit-on limiter les libertés pour protéger l’environnement ?

En principe, les statistiques montrent que l’ouverture des marchés accroît le bien-être des acteurs. Le libre déploiement de forces de marché réunissant l’offre et la demande et rendant l’initiative économique profitable est une condition essentielle pour la croissance, et donc pour la prospérité. Si la nature est surexploitée, c’est parce que le marché n’attribue aux biens environnementaux tels que l’eau ou l’air aucun prix rendant compte de leur rareté effective.

La surexploitation est tentante

L’environnement est un bien public : chacun peut le consommer à sa guise, personne ne peut être exclu de son utilisation. L’air pur est à tout le monde. Une nouvelle paire de chaussures est en revanche un bien privé dont ne peut disposer que celui qui l’a achetée. A l’inverse, les conséquences d’une surconsommation de biens environnementaux affectent non seulement le responsable mais aussi des tiers.

En économie, on parle d’externalités négatives. Ces répercussions sur les tiers sous forme d’atteintes à l’environnement n’ont pas de prix. Les responsables n’en tiennent pas compte dans leurs tarifs et le marché ne paie donc pas pour ces dommages. D’où des distorsions de prix : les biens dont la production nuit à l’environnement ont un coût trop faible, ce qui encourage une surexploitation des ressources. Les mécanismes de marché habituels ne fonctionnent donc pas pour l’environnement : on parle de défaillance du marché.

Un système de marché empêche-t-il vraiment de mieux protéger l’environnement ? Les interdictions, les directives techniques et les seuils d’émission sont-ils les seuls remèdes à la surexploitation ? La réponse est non. Des instruments appropriés permettent de corriger cette défaillance et de tirer profit des forces de l’économie de marché. Quand une émission affecte des intérêts restreints, cela peut prendre la forme de solutions privées négociées. Lorsqu’un large public est concerné, ce qui est souvent le cas, c’est à l’Etat de créer des conditions-cadres écologiques appropriées, par exemple en introduisant des taxes écologiques ou d’incitation. Cela confère un prix à l’exploitation de l’environnement et contribue à une meilleure réalisation des objectifs écologiques. Les externalités négatives sont incluses dès le départ.

Le pouvoir des certificats

Ces deux solutions nécessitent d’attribuer des droits de propriété sur les biens environnementaux : il faut donc des règles décrivant qui a le droit d’utiliser les ressources naturelles, ce que ces individus ou sociétés peuvent faire de cette propriété et à quel prix, si les droits sont négociables. Le système de marché favorise alors la protection de l’environnement.

C’est cette idée qui est à l’origine de la création de certificats d’émission dès la fin des années 1960. La quantité maximale d’émissions autorisée est fixée à partir d’objectifs environnementaux définis politiquement. Des droits d’émission sont alors attribués aux entreprises, qui reçoivent les certificats d’émission correspondants. Les entreprises générant plus d’émissions polluantes que la quantité permise par leurs certificats doivent réduire leurs émissions ou racheter des certificats à d’autres entreprises.

Les atteintes à l’environnement : un facteur à prendre en compte

Lorsqu’il revient moins cher pour une société polluante d’investir dans des technologies propres que de racheter des certificats, elle opte pour l’investissement. En revanche, les entreprises pour lesquelles cette solution serait trop chère peuvent acheter d’autres certificats. Ce sont ainsi les entreprises pour qui la réduction d’émissions coûte le moins cher qui réduisent leurs émissions, et l’objectif écologique prédéfini est rempli par une optimisation des coûts macroéconomiques.

Le succès des systèmes d’échange de droits d’émission dépend de leur organisation et de la volonté politique de faire payer aux acteurs économiques (et électeurs) le prix des nuisances environnementales. L’échange de droits d’émission pourrait ainsi devenir un instrument mondial efficace pour la protection de l’environnement.

Sara Carnazzi Weber , Août 2013

Partager
Envoyer par courriel Email
Viadeo Viadeo

Focus

Opinion Les contrats à terme « Total Return » devraient poursuivre leur croissance compte tenu de l’engouement des investisseurs

En 2016, Eurex a lancé les contrats à terme « Total Return Futures (TRF) » en réponse à la demande croissante de produits dérivés listés en alternative aux Total return swaps. Depuis, ces TRF sont devenus des instruments utilisés par une grande variété d’acteurs à des fins (...)

© Next Finance 2006 - 2024 - Tous droits réservés