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Et vogue la galère !

Les marchés financiers continuent de progresser avec une persévérance troublante. En Europe notamment, ni la dégradation du commerce mondial, ni le ralentissement confirmé de la croissance, ni l’accroissement régulier des dettes, ni les quelques jours qui nous séparent du 12 avril et d’un possible Brexit chaotique, ni la signature sino-italienne...

Les marchés financiers continuent de progresser avec une persévérance troublante.

En Europe notamment, ni la dégradation du commerce mondial, ni le ralentissement confirmé de la croissance, ni l’accroissement régulier des dettes, ni les quelques jours qui nous séparent du 12 avril et d’un possible Brexit chaotique, ni la signature sino-italienne qui conforte les positions chinoises dans les ports d’Europe du Sud et annonce des fortes tensions au sein de l’Union Européenne, ne semblent perturber la confiance des intervenants.

Si le rôle officiel de la BCE est d’assurer la solidité du système bancaire et la stabilité du système financier, sa mission inavouée est également de piloter les taux d’intérêt à la baisse pour éviter la faillite des Etats dont la dette pléthorique ne cesse d’augmenter. La logique qui en découle est paradoxale mais simple à comprendre, plus la dette augmente, plus les taux doivent baisser.

Face au ralentissement qui se profile, les marchés financiers sont convaincus que les banques centrales n’hésiteront pas à déclencher une nouvelle phase de baisse des taux d’intérêt pour stimuler l’activité. Or, la baisse des taux d’intérêt renchérit mécaniquement la valorisation des actions et obligations, tandis que les nouvelles liquidités injectées dans le système viennent nourrir la demande sur les marchés financiers. Nous assistons ainsi à un comportement paradoxal qui consiste à anticiper une hausse d’autant plus forte des marchés financiers que les anticipations économiques se dégradent.

La décision des banques centrales vise avant tout à préserver la survie du système.

Comme les États, elles ont renoncé à envisager le remboursement de la dette, de facto perpétuelle, et se contentent désormais de déployer les moyens requis pour assurer le paiement des seuls intérêts. Les obligations, lorsqu’elles parviennent à leur terme, sont remboursées puis immédiatement remplacées à l’aide de nouvelles émissions.

Et vogue la galère !

250 trilliards de dollars de dettes ont ainsi été accumulés sur la planète, par les États, les entreprises et les particuliers, trois fois le PIB mondial. Et la dette totale continue de progresser, chaque jour. Les banques centrales doivent calibrer le niveau des taux d’intérêt pour éviter toute tension susceptible de gripper le système. Et, face au ratio PIB/Dettes, plus le PIB risque de faiblir, plus les taux doivent baisser.

La baisse des taux d’intérêt n’est pas la cause première mais bien la conséquence d’une perspective inquiétante dont les deux principales variables sont la décélération de la croissance et le surendettement. L’approche actuelle des marchés financiers est pervertie en ce sens qu’elle s’appuie sur la conséquence et non sur la cause.

Une baisse des taux commence par une phase favorable. Le crédit est moins cher et tous les acteurs en profitent. Les particuliers achètent un appartement ou une nouvelle voiture, les entreprises augmentent leur chiffre d’affaires et leur productivité, les États perçoivent des rentrées fiscales plus conséquentes.

Cependant, à cet aspect positif succède une seconde étape moins encourageante. Tout d’abord, la forte demande de logement fait monter le prix de l’immobilier et des biens de rareté. L’épargnant subit une moindre rémunération de son épargne qui impacte sa consommation. Les entreprises se laissent tenter par des investissements, artificiellement rentables à l’aide de leviers importants, qui s’avèrent souvent périlleux sur la durée. Les États qui ont pris l’habitude de vivre avec un déficit budgétaire appellent une nouvelle baisse des taux au moindre ralentissement conjoncturel pour faire face au coût de la dette.

La dynamique s’autoalimente et nul ne sait combien de temps elle peut se maintenir. L’injection considérable de liquidités dans le système favorise un optimisme partagé.

Circonspects sur la durée de l’enthousiasme qui anime les marchés financiers aujourd’hui, sauf peut-être aux États-Unis, et convaincus qu’une « respiration » s’impose après trois mois de forte hausse, nous avons réduit notre exposition aux actions, notamment européennes. Nous pourrons ainsi saisir de nouvelles opportunités en cas de consolidation.

Jacques de Panisse Passis , Avril 2019

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