Effet Trump : Adopter une position défensive sur les actions

D’après les gérants actions de Robeco, les investisseurs devraient adopter un positionnement défensif vis-à-vis des actions, suite à la victoire écrasante des Républicains aux élections américaines. La victoire de Trump est défavorable aux actions à court terme et les actions des marchés émergents pourraient pâtir du protectionnisme...

D’après Mark Glazener, responsable de l’équipe actions internationales et gérant du fonds Robeco NV, les actions américaines étaient, à l’heure des élections, pleinement valorisées. En termes de croissance, nous avions prévu un scénario de sortie poussive, comme pouvaient le laisser prévoir les indicateurs de confiance des entreprises. L’indice ISM de la production aux États-Unis était descendu en dessous de 50 en août et s’était depuis rétabli, sans montrer de réelle tendance.

Le Sénat qui aurait pu facilement basculer dans le camp des Démocrates, reste désormais sous le contrôle des Républicains. La Chambre des représentants reste quant à elle, comme prévu, aux mains des Républicains et la présidence revient, contre toutes attentes, à Donald Trump. Il s’agit d’une victoire écrasante pour Donald Trump et les Républicains. Les actions sont donc sous pression dans le monde entier car la confiance en l’économie reste fragile.

« Les craintes des investisseurs sont axées sur la politique anti libre-échange et anti-migratoire de Donald Trump. S’il maintient son discours protectionniste, cela pourrait entraîner une récession longtemps attendue pour l’économie américaine. Les politiques de Trump ne sont pas encore totalement connues et son équipe l’est encore moins. »

Position gagnante à court terme

Selon Mark Glazener, un positionnement défensif sera payant à court terme. Un affaiblissement du dollar amortira la chute des actions américaines. Le secteur de la santé montrera des signes de soulagement, les projets d’Hillary Clinton sur la tarification des médicaments n’étant désormais plus d’actualité. Donald Trump ayant promis d’importantes dépenses d’infrastructures, les titres liés au secteur de la construction seront favorisés.

La grande question est de savoir ce qu’il adviendra des titres liés au secteur de la finance.

Les premières indications font état d’un repli du taux des obligations à 10 ans aux États-Unis, ce qui signifie un mouvement vers des placements sûrs. Cette situation ne fera pas le jeu des banques.

La première réaction sera de ce fait négative. Le maintien de cette situation dépendra entièrement de la position du président élu Donald Trump, ainsi que du choix et de la stabilité de son équipe. Si la politique commerciale était moins protectionniste qu’annoncé et les pratiques plus favorables aux marchés par d’importantes mesures de stimulation, des réformes fiscales et des relances budgétaires, le résultat final ne serait pas si catastrophique. Un premier pas dans cette voie sera le rétablissement des relations avec le Parti Républicain, qui contrôle désormais les pouvoirs politiques avec une majorité dans la Chambre des représentants et au Sénat.

Des marchés émergents secoués

D’après Fabiana Fedeli, gérante de portefeuille senior pour Emerging Markets Equities, une victoire de Donald Trump n’est pas de bon augure pour les actions émergentes. Nous prévoyons en premier lieu une réaction négative des marchés, de même qu’une volatilité généralisée à plus court terme. Les marchés seront secoués par les résultats des élections américaines.

« À court terme, nous pourrions assister à un nouvel affaiblissement du dollar américain. Toutefois, à plus long terme, si Donald Trump déclenche un scénario d’aversion pour le risque vis-à-vis des actions, on pourrait observer un reflux des actifs en direction des États-Unis, ce qui aurait paradoxalement un effet positif sur le dollar américain par rapport à un grand nombre de devises, dont celles des marchés émergents. »

Elle ajoute que sur l’ensemble des marchés émergents, elle prévoit que la réaction la plus négative proviendra du Mexique affectant en premier lieu le marché des devises très liquide du pays, et entraînant un net repli du peso, puis celui du marché actions.

Après le peso mexicain, le real brésilien est la devise la plus exposée, étant donné la dépendance du pays aux flux de capitaux étrangers.

« En définitif, nous prévoyons une diminution de la volatilité généralisée sur l’ensemble des marchés émergents lorsque les marchés se concentreront de nouveau sur les fondamentaux. Cela dit, il est probable que nous assistions occasionnellement à des pics de volatilité et à une nervosité des marchés, provoqués par d’éventuelles déclarations intempestives de Donald Trump en matière de politique étrangère ou par d’éventuelles mesures protectionnistes prises par son gouvernement. »

Les États-Unis ne sont pas si dominants

D’après Fabiana Fedeli, on peut s’attendre à une normalisation dans la plupart des marchés émergents. En dépit de la position protectionniste de son administration, Donald Trump est contre le Partenariat Transpacifique et souhaite augmenter les droits de douane sur les marchandises chinoises. Les États-Unis ne sont donc pas un partenaire commercial et d’investissement aussi dominant que l’on pourrait le croire. Le pays représente actuellement 12,8 % des exportations des marchés émergents, contre 14,9 % il y a dix ans.

Le rôle des investissements directs étrangers américains a considérablement diminué dans la plupart des marchés émergents depuis la période précédant la crise financière mondiale.

Cependant, ajoute Fabiana Fedeli, le Mexique est une exception. Le pays est en effet bien plus dépendant des États-Unis d’un point de vue du commerce, de l’investissement et du flux de travailleurs migrants. « Si le gouvernement Trump reste fidèle aux déclarations de sa campagne en matière de renégociation ou de retrait de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et sur l’expulsion des étrangers sans papiers résidant aux États-Unis, l’économie mexicaine pourrait considérablement être affectée. »

La victoire de Donald Trump peut être perçue par les marchés comme une catastrophe pour ce pays d’Amérique latine. En effet :

  • les exportations du Mexique vers les Etats Unis représentent 28% du PIB mexicain
  • les investissements américains représentent 1,4% du PIB mexicain
  • les transferts de fonds en provenance des États-Unis environ 2,1 % du PIB mexicain

Ainsi l’impact sur la devise et le marché actions pourrait se prolonger. Outre l’ALENA, Trump a indiqué sa volonté de revoir d’autres accords commerciaux. Le Pérou et la Colombie, qui ont signé des accords de libre-échange, sont aussi des pays exposés.

Un retrait de l’ALENA change la donne

Pour d’autres marchés émergents, l’importance des entreprises américaines sur leurs bénéfices pourrait dans une certaine mesure compenser le protectionnisme appliqué par l’administration Trump. Ceci est dû à une amélioration de la compétitivité en termes de coûts de la main-d’œuvre par rapport aux États-Unis.

Donald Trump a promis une hausse de 38% des salaires minimums américains au niveau fédéral. Si les salaires minimums fédéraux ne touchent qu’un nombre limité de travailleurs, il est probable qu’il y ait des augmentations des salaires minimums correspondants dans certains États. Fabiana Fedeli ajoute que dans le scénario de Donald Trump, la hausse serait associée à une perte d’emploi à bas prix si la main-d’œuvre constituée par les migrants sans papier, estimée à 7% de la main-d’œuvre totale des États-Unis, venait à disparaître. Le renforcement drastique des procédures de demande de visa diminuerait la main d’œuvre immigrée (soit 17 % de la main-d’œuvre totale des Etats-Unis) et pourrait entrainer une hausse de la masse salariale. Cela pourrait pousser certains exportateurs américains à délocaliser leur production à l’étranger.

Une politique étrangère inquiétante

L’impact potentiellement dévastateur de Donald Trump sur la politique étrangère américaine et par conséquent sur la géopolitique mondiale est une préoccupation majeure. Nous vivons dans un monde d’équilibres politiques délicats comme dans le cas du Brexit britannique, du conflit syrien et de l’hostilité entre la Russie et l’Occident, de la montée d’un pouvoir présidentiel plus autoritaire et nationaliste et des conflits territoriaux en mers de Chine orientale et méridionale.

Les États-Unis continuent de jouer un rôle important dans le maintien d’un grand nombre de ces équilibres fragiles et les déclarations de Donald Trump en matière de politique étrangère pourraient nous faire naviguer en eaux inconnues. Plus important encore, la tendance de Donald Trump de « tirer à l’aveuglette » quand il s’agit de politique étrangère pourrait bien faire de lui un cas classique d’éléphant dans un magasin de porcelaine.

D’après Fabiana Fedeli, il pourrait toutefois y avoir un côté moins sombre. Les présidents américains ne sont pas particulièrement connus pour tenir leurs promesses électorales et il est bien possible que les déclarations explosives de Donald Trump s’avèrent difficiles à mettre en pratique. Néanmoins, avec une majorité à la fois au Sénat et à la Chambre des représentants, ce côté moins sombre pourrait avoir du mal à s’éclaircir.

Next Finance , Novembre 2016

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